L’histoire vraiment peu banale de la villa Marie
L’histoire vraiment peu banale de la villa Marie
Villa MARIE est le nom que des élus ou des fonctionnaires d’après-guerre ont donné à une propriété qui a appartenue à un certain Monsieur Amédée Auguste Marie de 1925 à sa mort en 1939. Cette propriété de Gournay-sur-Marne a une histoire vraiment peu banale dont voici un aperçu de quelques périodes.
Elle est entrée dans le patrimoine de la commune en 1951-1952, mais cette propriété existait depuis 1880.
Elle aurait aussi bien pu s’appeler Villa REBOUL, du nom de son créateur architecte et propriétaire qui fut maire de Gournay pendant presque sept ans de 1888 à 1895.
Cette propriété était un des plus grands lots du lotissement dit du « Domaine du Château Blanc[1] ou Prieuré de Gournay-sur-Marne » mis en route par Mr Rustique LOISEL qui déposa le premier cahier des charges de ce lotissement le 14.11.1876 chez Me Coudray, notaire à Chelles.
Un article de la Société Historique[2] raconte la longue histoire de ce lotissement. Le terrain de plus d’un demi-hectare de M. Jules REBOUL allait de la promenade André Ballu (appelé alors « Quai du Château » par le lotisseur ainsi que dans le plan municipal de 1896) et usuellement nommé « Promenade du Patis », jusqu’à l’Avenue Loisel (la rue Ernest Pécheux actuelle).
C’est ce rectangle qu’occupent aujourd’hui trois éléments :
- Le Collège Eugène Carrière.
- Deux immeubles de logements.
- La villa Marie.
Atlas du Patrimoine 93
M Jules REBOUL, (1846-1910) alors âgé de 34 ans, était un architecte parisien, connu des familles NAST et BALLU. C’est probablement en 1880 qu’il s’est lancé dans cette construction.
Jules Reboul vers 1881 Académie d’architecture[3]
Son propre cahier des charges était de s’offrir une grande propriété de villégiature pour sa famille avec des capacités de réception pour les amis, amateurs de tranquillité bucolique, de pêche à la ligne, et même de soirées au coin du feu d’une très grande cheminée, grand luxe de la campagne. L’entrepreneur chargé de sa construction est encore à découvrir. Il avait du mérite car c’était là ce qu’on appelle « une maison d’architecte » : elle comprenait des petits défis techniques, une hauteur sous plafond respectable, de la charpente métallique, des voutes en béton coffré à tous les étages et entresols, une surface sous toiture sans piliers encore impressionnante aujourd’hui.
Son architecture est un peu compliquée avec plusieurs pentes de toit et des généreuses avancées normandes ayant vraisemblablement inspiré les constructions de meulières à toitures à saillies ou débords, plus modestes tout de même, qui ont suivi dans le « Domaine du Château Blanc du Prieuré » jusqu’à la belle époque incluse.
Extrait d’un plan de la voierie du lotissement du Prieuré validé par la municipalité en 1896, et le préfet en 1900
Jules REBOUL avait simultanément acheté dans le lotissement deux autre lots plus petits, un donnant sur l’avenue Rabuteau (aujourd’hui Eugène Carrière) et l’autre sur l’avenue du Potager (aujourd’hui Nast), sans doute dans le but de monter des opérations de construction-vente clé en mains pour des parisiens en quête, comme lui, de villégiature.
Au fait des inondations récurrentes de la Marne, il avait veillé à acheter des terrains moins inondables au-dessus des 39 mètres NGF.
Jules REBOUL a probablement loué une habitation du centre du village pendant les travaux en 1880 à moins qu’il n’ait été hébergé par les NAST ou les BALLU au Château Rouge ou à la Faisanderie.
Afin d’alimenter sa propriété en eau potable et bien qu’il disposait déjà d’un puits maçonné en haut de sa propriété à l’altitude de 40 mètres, qui donnait de l’eau mais qui ne pourrait pas rester longtemps potable avec l’urbanisation du lotissement, il décida de chercher de l’eau dans une nappe plus profonde. Il fit faire en février 1885 par la maison Brochot et Cie à l’emplacement du puit en maçonnerie préexistant, un forage[4] pour alimenter ses bassins et son arrosage, l’eau du puit était à -3,40 m et l’eau d’une autre nappe surgissait à -9,40m de profondeur, le forage fut arrêté dans des marnes blanches à veines jaunes à -13,41m.
Jules REBOUL venait en villégiature aux beaux jours à Gournay avec sa famille, son beau-père Faustin BESSON, deux domestiques et une institutrice. Aubert Clément Jules REBOUL s’était fait un nom comme architecte : Jules REBOUL. Pourtant en mairie, la plaque de marbre honorant les maires de Gournay, inaugurée en 1997, le nomme par erreur Jean REBOUL.
Jules REBOUL était né à Paris en 1846 d’un père vaudois protestant[5], Jacques François REBOUL, négociant et de Adeline PARENT, soeur d’Henri[6] et Clément PARENT, architectes parisiens très prisés de l’aristocratie, bâtisseurs de châteaux et de palais.
Jules REBOUL fit de brillantes études d’architecture à l’École Nationale des Beaux-Arts de Paris et épousa en 1874, Faustine BESSON, fille du grand peintre Faustin BESSON (1821-†1882), d’origine franc-comtoise, décorateur des palais du Second Empire (Tuileries, Saint Cloud, etc.) et de nombreux palais et hôtels particuliers jusqu’à son décès.
Faustin Besson (1821 Dôle -†1882 Paris)
En 1872-1873, le jeune architecte Jules REBOUL fut désigné secrétaire du comité chargé du concours pour la maîtrise d’œuvre de la reconstruction de l’Hôtel de Ville de Paris, qui avait été incendié pendant l’insurrection de la Commune. Le concours eut pour gagnant le binôme Théodore BALLU (1817-†1885) et Edouard DEPERTHES (1833-†1898). Le chantier colossal dura jusqu’en 1882, il impliqua de nombreux artisans, et les plus renommés artistes[7], sculpteurs, peintres et décorateurs de l’époque.
L’hôtel de Ville incendié et photographié en 1871
Théodore BALLU (1817-1885)
Architecte de la reconstruction de l’Hôtel de Ville de Paris
REBOUL travailla dans le cabinet d’architecture PARENT, de ses oncles, avant de se faire un nom et d’installer son propre studio d’architecture à 35 ans en 1881, au 19, rue Bonaparte. Il fut membre de la Société Centrale d’Architecture de 1881 à 1897. Plusieurs de ses réalisations sont classées M.H. ou figurent à l’inventaire supplémentaire des Monuments Historiques ou encore sont dans les listes des immeubles remarquables et protégés par un PLU, notamment , selon la base Mérimée du Ministère de la Culture
PA00088874 Musée Jacquemart-André commandé en 1868 par M. ANDRE à Henri PARENT qui s’associa à son gendre Jules REBOUL, terminé en 1875.
PA00088831 Hôtel Potocki (siège actuel de la CCIP) 27, avenue de Friedland en 1882-1884
IA00034064 Chateau de Bailly à la Chapelle Rainsoin en 1884-1885, reconstruction partielle en style néo-gothique
PA39000043 Établissement thermal de Lons le Saulnier en 1891-1894.
Il est probable que Jules REBOUL ait acquis ses trois lots de terrains à Gournay sur la recommandation de Théodore BALLU (1817-1884) qui venait souvent à Gournay pour se détendre, dessiner et pêcher, profitant du Château Rouge des Nast ou bien de la Faisanderie, le manoir de villégiature un peu rustique de son fils Roger BALLU, marié à Émilie Gabrielle NAST.
A l’été 1881 quand arriva la famille de Jules REBOUL, le recensement de la petite commune de Gournay avait déjà eu lieu. Il n’y avait encore que 142 habitants, dont 103 rive gauche et 39 rive droite, qui vivaient dans seulement 34 maisons et dans 45 appartements répartis dans 5 immeubles collectifs. C’est dire si Gournay avait plus du petit village rustique que d’un bourg.
Le beau-père de Jules REBOUL, l’artiste peintre Faustin BESSON, fut, en 1881 jusqu’à son décès en 1882, brièvement conseiller municipal de Gournay dont le maire était le châtelain Louis-Gustave NAST. Comme Roger BALLU, à l’époque simple conseiller, il n’était pas très assidu aux réunions semestrielles du conseil municipal.
Jules REBOUL, qui était déjà un des deux plus gros contribuables fonciers de Gournay avec Louis Gustave NAST, le châtelain, remplaça en 1882 son défunt beau-père Faustin BESSON au conseil municipal présidé par Louis-Gustave NAST.
L’avenue de la Marne au sein du lotissement du Domaine Château-Blanc du Prieuré, fut rebaptisée Faustin BESSON au cours d’une réunion du conseil municipal au printemps 1922, sous le dernier mandat d’Ernest Pécheux.
Jules REBOUL fut réélu conseiller municipal de Gournay-sur-Marne aux élections de mai 1886 à la suite desquelles Amédée PONCELET employé de commerce, radical, fut élu maire battant de peu le sortant conservateur Louis-Gustave NAST. Mais en février 1888, à la suite de la démission surprise de M. Amédée PONCELET obtenue par des manœuvres de la droite municipale, c’est Jules REBOUL qui fut élu maire de Gournay-sur-Marne avec des voix de la droite au centre gauche. Protestant, Jules REBOUL avait une image de républicain modéré.
La liste REBOUL fut réélue aux élections suivantes, cette fois elle incluait Roger BALLU et Gustave NAST. Dernier coup de théâtre en avril 1895, Jules REBOUL présenta sa démission par surprise ce qui permit, à son ami Roger BALLU sensiblement plus conservateur, de se faire élire maire, celui-ci démontrait là un bel opportunisme pendant l’absence de Gournay de son beau-père Louis Gustave NAST.
Recensement de 1886
En 1886 Jules REBOUL était recensé[8] à la future villa Marie, appelée alors « Domaine du Patis » avec son épouse Faustine, ses cinq enfants, une femme de chambre, une cuisinière, une institutrice, un couple de jardiniers.
En 1891, REBOUL était recensé à Gournay à 48 ans avec sa femme Faustine de 38 ans, ses quatre filles, un fils et un couple de domestiques suisses de la Chaux de Fonds (canton de Neufchâtel). Qui s’occupait donc du jardin d’un demi hectare ? Sans doute un de ses voisins horticulteurs et conseillers municipaux, M. JOUANNE ou M. BRAILLY, il y avait l’embarras du choix en horticulteurs et jardiniers à l’époque à Gournay où s’organisaient même les concours de la profession en alternance avec Le Raincy ou Gagny.
En 1896, Jules et Faustine sont encore recensés avec leurs cinq enfants et deux domestiques. Mais en 1901, les REBOUL avaient mis le cap à l’ouest, avenue de Versailles à Paris.
Jules REBOUL quitta certainement Gournay pour des raisons professionnelles qui le conduisaient de plus en plus souvent en province notamment en Franche-Comté. Il mit en vente sa propriété de 5446 mètres d’abord de gré à gré au prix de 41.000 francs en octobre 1898. Mais personne ne se précipita sur cette grande propriété.
Il relança la vente par une mise aux enchères aux soins de Me Barbe, notaire à Chelles, au prix de 38.000 francs, indiquant dans l’annonce du 18 mai 1901 que la luxueuse propriété lui avait couté près de 240.000 francs. Il est possible qu’il ait compris dans ce chiffre considérable ses beaux meubles, ses fresques, ses peintures, des sculptures et fabriques du jardin. Les murs et grilles de clôture, les aménagements paysagers représentèrent aussi un budget important.
Ce montant de 240.000 fr devait sembler exorbitant pour Gournay puisqu’une belle maison comme la villa « Les Iris » située promenade des Patis venait d’être réalisée par l’architecte local Fréderic BERTRAND avec seulement 15.000 francs de travaux, décoration, honoraires techniques et terrains en sus.
Occupants et/ou propriétaires ultérieurs du « Domaine du Patis » au 3 rue Ernest Pécheux
Finalement, le 19.10.1898 la propriété de 5445,80m2 de Jules Reboul et de sa femme Faustine Besson fut bradée aux enchères au prix de 41.200 francs, les acquéreurs étaient M. Jules Nicolas Moulin et son épouse Mme Marie Louise Joséphine Soyer.
La rue Ernest Pécheux[9] nom actuel de la voie en L reliant l’avenue Eugène Carrière et la rue Faustin Besson a eu le nom de « rue du Prieuré » après plusieurs années sous l’appellation de « Avenue Loisel » le nom qui était prévu dans l’ultime cahier des charges du lotissement Loisel-Rabuteau du 16.12.1884.
En 1902 Monsieur Moulin et son épouse vendirent le bien à Mme Lucienne BOSSOREILLE.
En 1903 et 1904 M et Mme PHYLO demeurant Domaine du Patis passèrent plusieurs annonces dans le mensuel l’Acclimatation des animaux et des plantes pour des animaux. Étaient-ce des locataires de cette propriété ou des parents de Mme de BOSSOREILLE qui passa également des annonces dans le dit mensuel le 17.08.1905. Mme Lucienne BOSSOREILLE sans doute veuve était recensée dans cette grande bâtisse avec un jeune garçon et une femme de chambre en 1906. Cependant une vente était enregistrée le 23.10.1905 par Mlle Eugénie Marie Bossoreille à Hyppolyte Jean Grandière au prix de 50.500 francs, mais le 1er août 1911 après le décès de celui-ci, Mlle Eugénie Marie Bossoreille recevait par succession le même bien de 5445m2 parmi d’autres biens..
En 1914, la villa apparaissait dans la succession du défunt GRANDIERE Jean Hyppolyte (1836-†1911) célibataire, rentier, sis 12, avenue des Tilleuls à Paris, après démembrement de propriété Mlle Eugénie Marie BOSSOREILLE avait cédé l’usufruit à Mme CADAU Marie, née en 1840.
Le 22 octobre 1917, Messieurs KINDLER et CARETTE, industriels, font l’acquisition de la nue-propriété avec droit de rachat de la vendeuse jusqu’au 22.10.1918. Mlle BOSSOREILLE exerça son droit de rachat le 3 septembre 1918.
Le 07/07/1921 la nue-propriété du « Domaine de Patis » sise au N°3 Rue du Prieuré était mise en vente sur saisie immobilière, au prix de 20.000 francs, l’annonce précisant à présent que l’usufruitière était née le 4 mai 1840, (vraisemblablement Mme Cadau qui devait étre âgée alors de 81 ans). Potentiellement une bonne affaire. La nue-propriété fut adjugée 51.400 francs tout de même.
https://www.retronews.fr/journal/le-matin/28-juin-1921/66/148525/4
L’usufruitière Mme Maria CADAU céda l’usufruit à M. Félix Jean Baptiste BELLAMY et son épouse Mme Yvonne Marie Suzanne QUINEFAULT L’usufruitière est probablement décédée entre 1921 et 1924 car c’était en pleine propriété que M. Jean Marcellin GUILLON (1863-†1933) entrepreneur de travaux publics sis 5, place Clichy à Paris cédait comptant le 25 juillet 1924 au prix de 115.000 francs, la propriété du Domaine du Patis à un certain M. Amédée Auguste MARIE, commerçant, célibataire de 43 ans qui à l’époque demeurait 38bis, rue Lamarck Paris 18ème.
Extrait du cadastre en 1950
Qui était ce monsieur MARIE dont le nom est resté à Gournay ?
Ce sympathique MARIE n’était pas une « sainte » à en croire les nombreux témoins d’immoralité de Montmartre cités par Jean-Marc BARFETY[10].
Amédée Auguste MARIE, né le 20 février 1881 à Toucy, un bourg à l’ouest d’Auxerre dans l’Yonne, était le fils d’un épicier et négociant en vins. Il avait aidé son père à élargir son activité au négoce de vins. Il s’était engagé devançant l’appel pour choisir son affectation à Paris. L’armée l’avait réformé en 1903 au bout de deux ans de soldat musicien à Paris, pour souffle au cœur.
Ses frères l’ayant précédé à Paris dans l’épicerie, il a pu les seconder un temps. Et là, il emménagea à Pigalle où il s’initia à la vie nocturne. Il reprit enfin comme ses frères, une épicerie, celle-ci dans le nord du 9ème, quartier réputé chaud à l’époque. Il créa un bar-club interdit aux femmes le Ferdinand’s, 89 rue de Cléry dans le 2ème arrondissement. Ce n’était pas sans précédent, mais le commissaire de police soucieux des bonnes mœurs lui a fait comprendre qu’il ne voulait pas de ça dans son quartier.
Monsieur Amédée MARIE, « tout en rondeurs, exquis à la verve joviale et à l’œil rusé » [11] présentait bien, d’abord connu comme honnête propriétaire bourguignon d’une épicerie et vins fins, rue Fontaine, dans le 9ème arrondissement. Les filles qui garnissaient les meublés du quartier le surnommaient « le sacristain« [12], pour sa chasteté et son allure. Issu du terroir bourguignon, il créa en octobre 1921 un fonds de commerce de restaurant « Au vrai Chablis » sis au 14 rue Laferrière à Paris 9ème.
Fin 1921, Amédée MARIE reprit en plus un fonds de commerce de cabaret à Paris, sis 2, rue Berthe, au cœur de Montmartre.
Poète, le créateur initial du fonds de « La Petite Chaumière » avait tenté, sans réussite, d’en faire un cabaret-spectacle de poésie de haute tenue. La reprise de ce bail en cours était une aubaine à ne pas laisser passer. M. MARIE garda l’enseigne « La Petite Chaumière » car le bâtiment dont il n’occupait que le rez-de-chaussée, qui était très proche du funiculaire, sans autre vis à vis, avait une petite terrasse avec rotonde ou des tonnelles qui justifiait un nom bucolique.
La Petite Chaumière est en bas à gauche de cette carte postale de 1905
Amédée MARIE était « Monsieur TAGADA » pour les clients de « la Petite Chaumière » sis 2, rue Berthe à Montmartre. Un lieu vite classé par la préfecture de police dans la sous-catégorie « établissement de nuit à surveiller de très près« . Chronologiquement ce fut le tout premier établissement parisien de cabaret-dancing de travestis, et c’est devenu un des premiers lieux de rencontres inverties[13] des années folles.
Non, ces sucreries n’existaient pas encore.
En étymologie , l’origine avancée du mot Tagada est « tac » qui est l’onomatopée enfantine du galop de cheval. Rien à voir avec « Prosper yop la boum » une chanson très populaire créée seulement en 1935 par Maurice Chevalier comprenant « Yop la boum tagada tsoin tsoin » écrite par Vincent Scotto d’où viendrait l’expression faire « Tagada Tsoin Tsoin ». Qui a commencé à faire tsoin-tsoin ?
La renommée de « monsieur TAGADA » et de la Petite Chaumière de Montmartre était internationale, c’était devenu en très peu de temps un pôle d’attraction touristique nocturne à Montmartre qui avait le don de bien énerver le Préfet de Police.
Il faut rappeler que l’homosexualité a été légale en France de 1791 jusqu’au régime de Vichy. La ligne rouge était l’âge, la majorité civile étant fixée à 21 ans depuis 1792. La seule infraction sérieusement réprimée dans ce type de commerce était l’incitation de mineurs à la débauche. Or ses premiers artistes danseurs en 1921 étaient principalement des jeunes, souvent mineurs, prostitués homosexuels et très souvent toxicomanes, venus de la place Blanche qui portait bien son nom.
La gérante[14] de La Petite Chaumière était la jeune compagne de monsieur MARIE, madame Irène LEBRUN qui avait recruté tout au début ses futurs artistes sur le boulevard de Clichy où ils tapinaient.
Mais une fois instruits du règlement intérieur de l’établissement et disciplinés par « Monsieur TAGADA », les jeunes prostitués, promus artistes travestis, avaient appris , entre deux numéros de danse, à bien se tenir avec les clients et surtout à leurs faire acheter les bouteilles d’alcool et de champagne parmi les plus chères de Paris. Le bouchon servait déjà d’unité de compte. La clientèle de la Petite Chaumière pouvait être très généreuse avec les artistes et avec la dame qui gérait la logistique des toilettes[15]. Les loges des artistes étaient strictement réservées au personnel.[16]
TAGADA n’était ni souteneur, ni proxénète hôtelier (de toutes façons, ce denier délit n’existait pas encore).
De nombreux sites communautaires[17] ou touristiques[18] de Montmartre mentionnent « La Petite Chaumière » comme le premier lieu de rencontres homosexuelles masculines de Paris. Mais la Petite Chaumière de Tagada-Marie n’avait pas de chambre, et le backstage était interdit à la clientèle.
À Gournay, ce serait une autre histoire. Autre préfecture, autres mœurs.
National Gallery of Arts : par George Grosz « à La Petite Chaumière » 1924
Crayon, encre noire et aquarelle sur vélin. 47.15 × 62.87 cm
Monsieur MARIE et sa compagne Irène LEBRUN, eurent affaire à la Préfecture de Police et à la justice pour entre autres chefs d’accusation : »Incitation de mineurs à la débauche »[19].
Le préfet de police leur fit involontairement une belle publicité, les ennuis policiers et judiciaires étant rapportés avec des détails croustillants dans les colonnes spécialisées des arts et de la nuit de la presse parisienne, jusqu’au Herald Tribune, le journal américain publié à Paris. Justement cette clientèle internationale, britannique et américaine surtout, était très friande du « Paris interlope[20]« . De riches américaines venaient toutes émoustillées à la Petite Chaumière pour toucher de leurs propres yeux les éphèbes dansants de M. TAGADA entrainés par l’animateur « ZIGOUIGOUI » ou son successeur « TONTON ».
Photo d’origine inconnue postérieure à 1925.[21] achetée sur ebay par la SHNGC
1924, leur troisième année pleine à la « Petite Chaumière » fut une excellente année pour le couple. Les affaires marchaient vraiment très bien, c’était probablement l’endroit où le champagne était vendu le plus cher, à Paris la nuit. La concurrence ne s’est faite sentir que deux ou trois années plus tard avec le « mercato » des travestis vedettes.
L’amnistie générale de mars 1924 votée par le cartel des gauches évita à Amédée Marie et à Irène Lebrun une condamnation pour incitation à la débauche de mineurs.
Marcel Vertés : le cabaret dancing. Lithographie de 1924 37,8 X 56,2
Sur cette lithographie de Marcel Vertés, celui qui se penche vers Zig est peut-être Amédée Marie, le patron dit Tagada avec une tache rose « tagada » au revers de sa veste
Le personnage de droite est Zig dit Zigouigoui, le pilier de la troupe, « meneur de la revue » de 1921 à 1924 (ce qui est un grand mot pour la demi-douzaine de danseurs travestis qui pastichaient des scènes de music-hall). Ces tentures roses pourpres ostentatoires furent signalées par Francis Carco dans « Images cachées ».
À partir de 1925, ayant quitté Tagada, Zig, autrement dit Louis Gaudin (1900-1936) ancien élève de l’École Nationale des Beaux-Arts a fait une fulgurante carrière de décorateur et de costumier[22] dans plusieurs grands music halls parisiens dont les Concerts Mayol d’Oscar Dufrenne, (dont il a aussi dessiné des prospectus), Oscar Dufrenne était un des plus gros clients en plumes et boa de la Maison Schwartz Ullmann dans le monde des spectacles. Zig a fini par diriger des boites de nuit concurrentes de La Petite Chaumière.
Illustrations d « Images Cachées » de Francis Carco par Marcel Vertés. 1ère édition ed. La Roseraie 1928
https://www.librairie-koegui.fr/categories/litterature-xxe-siecle/tirage-limite/images-cachees.html
Du « Domaine du Patis » au « Castel Mignon »
– 3, rue du Prieuré ou – 5, Promenade du Patis
En 1924, Amédée Auguste MARIE fit donc l’acquisition (en pleine propriété) du « Domaine du Patis » situé 3, rue du Prieuré ( Ernest Pécheux) ou 5, promenade du Patis à Gournay-sur-Marne avant d’épouser à Paris 18ème fin 1924 sous le régime de la séparation de biens, sa jeune compagne et gérante depuis 1922, Mlle Irène (Camille Irène Antoinette) LEBRUN (1900-1986).[23]
Cette fois il se déclara le gérant de la future « hostellerie ».
L’idée de cette grande maison à Gournay selon Jean-Marc BARFÉTY[24] n’était pas d’en faire une résidence secondaire pour eux-mêmes, ni une belle maison pour leurs vieux jours mais d’offrir aujourd’hui un lieu de villégiature pour la « clientèle choisie » qu’ils recevaient habituellement à La Petite Chaumière.
Tagada pensait probablement aux couples qui se seraient trouvées, à la Petite Chaumière, des affinités voire plus, et que le standing du Grand Hôtel Lepic de son frère Georges MARIE, ou des hôtels similaires de Montmartre, ne comblait pas. Il envisageait aussi d’accueillir des couples romantiques comme il en existait de plus en plus dans les milieux artistiques et littéraires de Montmartre.
Le bien du 3, rue du Prieuré[25] sur un terrain de près de 5500m2, ne comprend alors que la grande bâtisse d’habitation et de réception de villégiature bourgeoise en meulières de Jules REBOUL avec vue sur la Marne, puisqu’elle en est riveraine à hauteur du n°5, Promenade du Patis[26] avec un jardin paysager et arboré, des bassins, un potager et un verger.
En 1924, les seuls voisins à l’ouest étaient la famille de Paul Ernest PÉCHEUX peintre-décorateur à la retraite, veuf, propriétaire de la villa les Pervenches au 1, rue du Prieuré. Il était également le maire de Gournay-sur-Marne, depuis le décès en 1908 de Roger BALLU dont il fut l’adjoint. Il est décédé, le 18.01.1925 à 83 ans. Sa fille unique Jeanne, épouse de Jules LEMOINE, professeur agrégé de mathématique et physique, décédée en 1941 y éleva une grande famille.
En face du 3, rue du Prieuré, habitaient en villégiature M et Mme Edmond SCHWARTZ, propriétaires d’une maison de plumasserie, fournisseurs des grands spectacles, ou d’autres membres des famille SCHWARTZ et ULLMANN, venus surtout pour la pêche aux brochets et aux gardons le jour, aux chevennes la nuit.
De l’autre côté de la rue Faustin Besson, Mme Cécile BOUYSSON née BEL et Marguerite une nièce étaient en villégiature dans le beau manoir de la tante Cécile BEL (veuve d’Archibald BROAD en 1907) qui décédait en 1925 à Paris. Le manoir Bel-Broad fut sans doute mis en vente après 1926 par Cécile BOUYSSON, probablement la seule héritière.
En juillet 1926, après deux années de travaux de transformation, auxquels participèrent des employés de ses établissements parisiens, l’appellation « Domaine du Patis » fut remplacée par l’enseigne « Castel Mignon« . Amédée MARIE ne cachait pas son jeu à Gournay. M. MARIE s’est donc déclaré hôtelier avec une douzaine de chambres luxueuses. Toutefois son hôtel pension qui n’accueillait surtout pas les familles, n’est jamais entré au guide Michelin en treize années d’activité. Contrairement à Montmartre, c’était profil bas et discrétion.
Pour changer des tentures et des rideaux roses pourpres de La Petite Chaumière, les douze grandes chambres avec bains avaient des décorations originales et différentes d’un haut raffinement[27] comme dans les grandes maisons closes de luxe de Paris. Amédée MARIE, esthète, était un habitué des salles de vente et y avait choisi avec goût, au fil du temps, les meubles et les éléments décoratifs du Castel Mignon. Le rez-de-chaussée où l’architecte Jules REBOUL avait créé en 1880 une très grande pièce de réception autour d’une immense cheminée fut doté d’un salon-bar américain réservé à la clientèle de l’hôtel et d’une salle à manger de restaurant, Les caves immenses qu’il fit visiter à Francis CARCO étaient probablement emplies des mêmes vins fins de Bourgogne que son restaurant « Au Vrais Chablis ».
Dans « Images cachées » écrit en 1928, Francis CARCO raconte sa visite à La Petite Chaumière reçu par un TAGADA très accort. Quand le patron l’invita ensuite au Castel-Mignon en décembre 1926, il put voir la chambre aux papillons, la chambre aux roses trémières, la chambre cubiste, la chambre Empire, la chambre Marie Antoinette, les autres étaient peut-être occupées, il y avait parait-il au total douze chambres décorées somptueusement, chacune possédant sa salle de bains.
Amédée MARIE disait à Francis CARCO[28] s’entendre très bien avec le curé de Gournay qui eut l’occasion de sermonner ces jeunes garçons qui portaient des robes moins sévères que les siennes.
Le lancement commercial de l’Hostellerie Castel Mignon donna lieu à une campagne publicitaire entre le 14 juillet et le 3 Août 1926 par publicités rédactionnelles et par annonces classées dans de nombreux titres de la presse quotidienne dans les rubriques « Villégiatures » et « Pensions de Famille »
Les publicités rédactionnelles différaient peu des petites annonces sinon que le texte était télégraphique dans les annonces classées qui de six lignes au début de la campagne passèrent à deux-trois lignes à la fin de la campagne de lancement en août. Par exemple :
Publicité dans le quotidien LA LIBERTÉ dans ses éditions du 14 et 15 juillet 1926 Page 2/6: Castel Mignon est ouvert 5, allée des Patis,
Gournay-sur Marne. Tél 27. 20 km
Paris par porte Vincennes ou gare Est
Déjeuners, dîners ; 30 fr grands vins,
Grands et petits appartements, tout con-
-fort. Tranquille, reposant, discret.
Clientèle choisie.
Les premières annonces, le 14 et 15 juillet dans le journal « La LIBERTE » donnaient une adresse erronée « 5, allées des Patis », l’erreur fut corrigée dans les suivantes avec « 5, promenade du Patis ».
Mettre ainsi en avant l’adresse de la Promenade du Patis qui n’était pas l’accès normal de la propriété peut surprendre. Tagada pensai-il que ses clients qui ne se sentaient pas en odeur de sainteté auraient du mal à s’encanailler au 3, rue du Prieuré ?
Publicité dans les petites annonces de la rubrique Villégiatures à 5 Fr la ligne
de PARIS-SOIR du 25 du 26 et du 27 juillet 1926 et idem dans L’INTRANSIGEANT
et dans EXCELSIOR les 25 au 31/07/ 1926
CASTEL MIGNON
5, promenade des Patis, Gournay-s.-Marne. Tél. 27
Hostellerie, restaurant, pension famille confortable.,
petits et grand appartements. Prix pour séjour. —
Publicité dans les petites annonces à 5 Fr la ligne de la rubrique Hôtels-Pension de Famille-Villégiature de COMOEDIA du 03/08/1926, un titre qui touchait bien le monde des arts et de la culture :
CASTEL MIGNON,
5, promenade du Patis, Gournay-sur-Marne. Tél. 27.
Hostellerie restaurant. Pension famille confortable.
Petits et grands appartements. Prix pour séjours.
Dans LE JOURNAL du 24/07/1926
CASTEL MIGNON
5, promenade du Patis, Gournay-s.-Marne, T.27.
Hostellerie-rest. Pens. fam. Conf. Pet. et grds
appartements. Prix pour séjours. »
Il ne semble pas qu’il y eut d’autre publicité dans la presse pour le Castel Mignon les années suivantes. Amédée Marie se contentait du « bouche à oreille » dans le milieu artistique et de la promotion directe auprès de la clientèle de La Petite Chaumière. Les artistes danseurs qui aimaient bien cet endroit, aussi, se faisaient prescripteurs.
Autre preuve que le tourisme à Gournay n’avait pas attendu les congés payés, en 1931, le propriétaire[29] d’en face au 12, rue Ernest Pécheux, passait une annonce dans la rubrique Villégiature de l’Intransigeant :
et le même jour paraissait une annonce pour pension à 35 francs au 4 quai de Marne à Chelles
Le repas seul coûtait déjà 30 francs sans les boissons au Castel Mignon.
Amédée MARIE est décédé prématurément le 29 avril 1939 à Paris XVIème à 58 ans. Le cœur a ses raisons que la raison ne connait point[30]. Il savait sans doute depuis son conseil de réforme militaire qu’il ne fallait pas trop compter dessus. Il fut enterré le 2 mai 1939 au cimetière parisien de Pantin.
Sa veuve refusa l’usufruit auquel elle avait droit. L’actif de la succession MARIE à la date du décès était estimé à 339.000 francs environ et le passif à 64.000 francs environ.
Les ayants droits d’Amédée MARIE, sa fratrie et ses neveux et nièces mirent plus de dix ans à régler des successions croisées. La succession MARIE mit en vente, fin juillet 1939, les meubles du Castel Mignon dont le commissaire-priseur tira en deux vacations presque 33.000 francs, une très belle somme[31].
Le sort de l’hostellerie Castel Mignon pendant la guerre et l’occupation n’a pas marqué les esprits des Gournaysiens. Comme la propriété n’était plus meublée, elle n’a pu être pillée.
Il est possible que les pouvoirs publics d’avant l’armistice du 22 juin 1940 l’aient réquisitionnée pour loger des réfugiés français ou belges, c’est difficile à certifier. S’il existe des preuves d’une réquisition, la Société Historique en trouvera dans les archives municipales ou départementales. Le mandat des conseillers municipaux élus en avril et mai 1935 pour six ans, furent maintenus jusqu’ en novembre 1942. Le gouvernement de Vichy procéda par décret en 1942 pour nommer les membres et président de la Délégation spéciale municipale dans chaque commune. Il n’y a eu pas de conseil municipal pendant cette période. Les archives de cette période sont taiseuses.
Dans les archives municipales de Gournay se trouve un tableau du 10 mai 1943 intitulé « ÉTAT DES CANTONNEMENTS » qui liste les propriétés réquisitionnées et l’occupation à cette date. Il était envoyé à la KreisKommandantur 991 d’Enghein-les-Bains district militaire dont la Kommandantur de Gournay dépendait.
Il y est écrit pour la propriété de l’indivision Marie qui est appelée « Maison Marie » et qui a le numéro de téléphone 28 qu’elle est occupée depuis le 17/03/1942 par l’unité n° 36065
La Kommandantur de Gournay-sur-Marne était située au Rond-Point du Prieuré à quelques mètres. une douzaine de grands immeubles inoccupés figurent aussi sur cette liste de réquisition en précisant leur capacité d’acceuil en officiers, en hommes, en chevaux et véhicules.
Des images souvenirs des militaires allemands pourront se retrouver en vente un jour ou l’autre. Des rumeurs de collaboration horizontale entre juin 1940 et aout 1944 ont circulé et des femmes auraient été tondues à Gournay entre fin août et début septembre 1944.
Gournay est libéré par les Américains le 27 août 1944 et le Comité local de libération constitué le 28 août 1944 est dirigé par Édouard LE PICHON . Il se lance immédiatement dans l’épuration La municipalité sortie des urnes en avril 1945 est 100% issue de l’Union Patriotique Républicaine qui comprenait 7 communistes dont M Félix MERCADIER, PCF, qui fut élu maire, Le Pichon ayant été épuré. La finalisation de la succession MARIE n’était pas en vue, l’acquisition par la commune n’a pas été envisagée à ce moment là. Il ne fallait pas être grand clerc pour comprendre que la succession MARIE était alors satisfaite de voir l’État pour le compte de la Direction Générale de l’Éducation et de la Jeunesse, réquisitionner la propriété MARIE moyennant une indemnité d’occupation temporaire pour sa mise à la disposition à l’O.S.E.
L’Oeuvre de Secours aux Enfants O.S.E.
L’Œuvre de Secours aux Enfants (O.S.E.), était la branche française d’une structure internationale créée par des médecins hygiénistes juifs œuvrant depuis des dizaines d’années, en Europe, en France notamment, pour les enfants réfugiés juifs de l’est.
En 1945, l’O.S.E. se chargeait en priorité des orphelins et des enfants déplacés sans nouvelle de leurs parents déportés. Certains enfants et adolescents souffraient de dénutrition et de troubles squelettiques qui nécessitaient des soins médicaux et de réadaptation comme la kinésithérapie et la gymnastique. En même temps, l’O.S.E. qui poursuivait son apostolat de l’hygiénisme, souhaitait former pour ses propres besoins et mettre à l’épreuve pratique des moniteurs pour maison d’enfants et société sportives avec le soutien de l’administration générale des sports et de la jeunesse.
En juillet 1945 Georges Loinger[32] est le chef de la section Éducation physique au bureau de la Direction Centrale à Paris de l’Œuvre de Secours aux Enfants.
« l’OSE me demande de monter une école de moniteurs sportifs à Gournay-sur-Marne. Aussitôt dit, aussitôt fait avec en plus la bénédiction et l’appui du ministère de la Jeunesse et des Sports très intéressé par le projet. »
Georges Loinger embauche son second Maurice Brauch, un jeune, survivant de Buchenwald.
« Est installé à Gournay un internat pour les apprentis moniteurs, mais également pour quelques enfants ayant besoin de gymnastique corrective et donc de soins suivis ».
– United States Holocaust Memorial Museum. photo © Walter Limot
Des travaux d’adaptation des locaux furent réalisés. Le centre O.S.E. de Gournay devait comprendre :
1° l’hébergement sous le statut d’une auberge de jeunesse : disposant d’un dortoir garçons et d’un dortoirs filles, d’une cantine.
2° l’instruction et la formation avec du personnel spécialisé dans des salles de classes,
3° les activités physiques d’entrainement : Moniteurs E.P.S., salles de kiné et de culture physique…Terrains de sport (volley, basket, agrès, etc.)
Droit et Liberté 29 novembre 1945
« En octobre 1945, G. Loinger ouvre l’école de Gournay-sur-Marne, où une vingtaine de jeunes reçoivent leur première formation de moniteurs . »[33]
Les cours principaux pour élèves moniteurs devaient y être assurés par M. Maurice Baquet[34] Directeur Technique du Collège National de Joinville. Mais il fut nommé fin 1945 Directeur-adjoint de l’INS (futur INSEP de Joinville le Pont) et n’eut probablement pas le temps de faire tout ce qui était prévu pour l’O.S.E. de Gournay.
« Malheureusement, l’aventure ne dure qu’un an, faute de financement, et, furieux, je donnai ma démission à M. Ratner de l’OSE. »[35] (G. Loinger)[36]
© Walter Limot https://collections.ushmm.org/search/catalog/pa1158206
Remise de diplômes en 1946 photo de © Walter Limot
Municipalisation de la propriété Marie
GOURNAY-SUR-MARNE ; COLLÈGE EUGÈNE-CARRIÈRE – VUE DES ALENTOURS Mouna Deghali © CAUE 93
Enfin en décembre 1950 le notaire de la succession MARIE avait réglé les derniers détails, déposé la déclaration de succession définitive et remis le titre de propriété aux consorts MARIE. Le notaire avait fixé la valeur vénale des 5500 m2 à 1.800.000 fr en 1945. Il fallait encore qu’ils se mettent d’accord sur un prix de cession. Les vendeurs étaient maintenant pressés de vendre pour tirer parti de la pénurie.
Les archives municipales indiquent que les services de l’Administration des Domaines avaient fixé le prix à 2.200.000 fr repris dans l’acte authentique de vente à la commune de Gournay représentée son Maire monsieur Adolphe PERILLAT-PIRATOINE. La commune avait sollicité un financement auprès de la sécurité sociale car la destination première de cet immeuble étant un centre P.M.I. Protection Maternelle et Infantile.
M Adolphe PERILLAT-PIRATOINE, maire pendant trois mandats entre 1947 et 1961, a pu ensuite y installer des petites classes de primaire jusqu’au certificat d’études primaires et des logements pour les enseignants.
Pendant les deux mandats de 1961 à 1983, de Robert RINGOT, qui prévoyait une forte croissance démographique, il a fallu persuader l’état qui voulait regrouper Gournay avec Noisy Le Grand, que Gournay avait impérativement besoin d’avoir son propre C.E.S. Collège d’Enseignement Secondaire, ce qu’il a obtenu. Ensuite il y eut d’âpres discussions sur le format de l’établissement. C’est donc au même endroit que le Groupe Scolaire de la rue Ernest PECHEUX a été construit en 1969 et livré en 1971. C’était un ensemble de six constructions neuves autour d’une cour de récréation, conçu pour accueillir 12 classes, (dont deux classes de perfectionnement dans un préfabriqué) et deux bâtiments de logements de fonction type F3 et F4, l’un étant situé vers la promenade André-Ballu et le second étant situé du côté de la rue Ernest-Pêcheux en mitoyenneté avec la villa Marie.
En raison des risques d’inondation, les bâtiments les plus au nord ont été élevés sur un vide sanitaire à 1,50 m environ du sol naturel.
La villa Marie a accueilli le réfectoire du groupe scolaire et encore des logements de fonctionnaires. Cet établissement scolaire du 1er degré put même accueillir quelques classes d’enseignement secondaire avant de devenir un collège[37] après la construction d’une nouvelle école rue des Pâquerettes.
Toutefois, l’augmentation des effectifs et des problèmes de dysfonctionnement conduisirent le Département, le 27 juin 1989, sur l’insistance de la municipalité de Georges ROBERT (de 1983 à 1995) à programmer une rénovation complète de l’établissement définie en 1990 et à décider fin 1990 une extension « format 450 » pour livraison en 1993. Cette fois l’établissement reçu officiellement un nom : « Collège Eugène Carrière ».
Parmi les constructions d’origine de 1971, le bâtiment principal a été conservé, ainsi que les logements de fonction. Construit selon la technique du pont en poutre treillis, le bâtiment suspendu qui relie un bâtiment de 197, relifté et un nouveau bâtiment donne une « impression de transparence et d’ouverture sur le paysage environnant » selon le verbiage de l’Atlas du Patrimoine de Seine Saint-Denis.
À propos d’Eugène Anatole Carrière :
L’artiste peintre, est né à Gournay le 16 janvier 1849 à 3 h du matin [38] et il fut baptisé avec un de ses frères la même année à Gournay-sur-Marne. Il n’y serait resté que trois ans environ. Mais ses parents et sa fratrie y vécurent d’avantage puisque son père Léon Carrière, 32 ans sous-directeur d’assurance y a été recensé avec sa femme, sa belle soeur et ses 5 enfants, en mai 1846, deux ans et demi avant la naissance d’Eugène, à l’adresse Grande Rue, 9 ce qui correspond à un immeuble d’appartements côté est de la place de l’église, entre l’ancienne mairie et le café-pension-tabac de Mme Dardou Vve Monnet.
Eugène Carrière à la Villa des Arts
Destination actuelle de l’immeuble :
Le bas de la villa Marie est devenu le Musée Eugène Carrière[39] et au-dessus du musée, les logements après réaménagement sont devenus des locaux tertiaires pour les associations :
- la Société des Amis d’Eugène Carrière qui administre le Musée
- la Société Historique de Noisy-Gournay-Champs, son Centre de Documentation Jacques Guillard et le fonds d’archives du Comité Départemental Charles de Gaulle.
Quant au sous-sol, il sert de réserve pour ces associations.
Comparaison des vues aériennes
avec « remonter le temps » [40]de l’institut géographique national
1950
2022
En résumé, ce lieu aura été successivement occupé par :
- Du XIème au XVIème siècle inclus, le logis d’un prieuré d’une trentaine de très chastes et très laborieux moines bénédictins filiale de Notre Dame des Champs de Paris.
- Sous le roi Soleil, la résidence d’intellectuels de haut niveau ayant fait voeux de célibat, l’abbé de Dangeau et l’abbé Alary, anciens précepteurs royaux et membres de l’Académie Française.
- Au début du XIXème la villégiature de trois générations de Nast, industriels céramistes, philanthropes, châtelains, et maires de Gournay.
- Entre 1870 et 1873, le campement de soldats wurtembergeois.
- Durant le dernier quart du XIXème la maison de campagne de l’architecte Jules Reboul, maire de Gournay pendant le premier lotissement de Gournay, et de son beau père l’artiste peintre classique du peintre Besson.
- Pendant la première guerre mondiale, à rechercher éventuellement aux archives des trois sociétés de la Croix Rouge.
- Entre les deux guerres, une mignonne hostellerie de tolérance pour clientèle choisie.
- De juin 40 à août 44, une pension militaire avec éventuellement une collaboration horizontale. (probable, restant à certifier[41]) .
- Après-guerre un centre de formation de l’Œuvre de Secours aux Enfants (juifs).Dans les années 50-60 un centre de santé infantile et plusieurs classes primaires.
- Dans les années 70, le réfectoire d’un collège du secondaire.
- Dans les années 80-90-00 des logements majoritairement d’enseignants.
- Depuis les années 2010 : Au 3, rue Ernest Pécheux aux étages : les locaux et siège de la SHNGC, une société savante se consacrant à l’histoire de proximité. Au 5, avenue Ernest Pécheux au R-D-C et aux étages : le siège de l’association des amis d’Eugène Carrière www.eugenecarriere.com et du Musée Eugène Carrière.
Étude de la société historique réalisée entre août 2023 et mars 2024 par Claude Antoine Schwartz avec l’assistance d’Alain Barthelmay et l’aimable concours de Mme Sylvie Le Gratiet. Article publiée initialement en mars 2024 (versionV5) sur gournay-historique.fr
L’article sera mis à jour au fur et à mesure des découvertes probables ou certifiées.
La société historique remercie les visiteurs du site qui voudront bien y laisser des commentaires et / ou y déposer des informations, images, coupures de presse, etc. V5
Vous aussi, vous pouvez contribuer à écrire l’histoire de votre ville. Lancez-vous, les membres de la Société Historique Noisy Gournay Champs ne demandent pas mieux et vous aideront.
Pour nous contacter : contact-shngc@gmail.com
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Le confortable logis du Prieur du Prieuré de Gournay avait pris le nom de « Chateau Blanc » après son acquisition et sa transformation en villégiature par Jean Népomucène Nast, riche industriel parisien en 1803 ↑
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Par Alain Barthelmay et Claude Schwartz https://www.gournay-historique.fr/2024/01/03/les-protagonistes-du-lotissement/ ↑
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source http://conservation.academie-architecture.fr/objet/537 ↑
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BRGM Infoterre Fiche Données – Dossier du sous-sol – BSS000PMHT http://ficheinfoterre.brgm.fr/InfoterreFiche/ficheBss.action?id=01845X0034/F1 ↑
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Vaudois, habitant du canton de Vaud, en Romandie au nord du Léman, un état francophone de la confédération helvétique. Biographie tirée de https://www.societe-emulation-jura.fr/wp-content/uploads/2021/10/architectes-Jura-XIXe-2021.10.07.pdf ↑
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Henri Parent est intervenu comme architecte dans la rénovation et l’extension du château de Noisiel. ↑
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Eugène Carrière a peint six écoinçons pour le salon des Sciences, salon d’apparat de l’hôtel de ville de Paris ↑
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Recensement tous les cinq ans de Gournay aux Archives Départementales. ↑
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https://www.gournay-historique.fr/2024/01/28/histoires-des-rues-de-gournay-sur-marne/ ↑
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Nous recommandons le livre de J. Marc Barféty, rééditant et enrichissant de notes, iconographie et compléments « Adonis-Bar » de Maurice Duplay édition Gay Kitch Camp 2023 dont plus de 200 pages sont consacrées à la Petite Chaumière, à Amédée Marie et à ses entreprises. ↑
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Selon Françis Carco dans « Images cachées » édition Albin Michel cité par J.M. Barféty op. cit. ↑
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D’après Pierre de Trévières « Le petit épicier » article paru dans le Cri de Paris 23-11-1924 cité par J.M. Barféty, op.cit. ↑
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1924 fut l’année de la première parution de la revue Inversions (seconde revue ouvertement homosexuelle) voir https://www.memoire-sexualites.org/annees-20/ ↑
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Un loi encadrant la prostitution, prévoyait qu’un établissement abritant ce type d’activité ne puisse être dirigée par un homme. Bien que la Petite Chaumière ne répondait pas à cette définition, MARIE fut prudent. ↑
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Nous parlons, bien-sûr, des toilettes des danseurs travestis qu’il fallait changer à chaque numéro. ↑
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Selon les nombreux auteurs cités par Jean-Marc Barfety dans les annexes et les nombreuses notes de l’édition de « Adonis-Bar » de Maurice Duplay édition Gay Kitch Camp 2023 ↑
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Entre autres : http://www.hexagonegay.com/region/paris20.html http://culture-et-debats.over-blog.com/article-341637.html ↑
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https://www.montmartre-secret.com/ ↑
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Archives départementale de l’Yonne : La fiche matricule militaire comporte la mention sévère d’une ordonnance de la cour d’appel de 1924. ↑
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Interlope : syn : douteux, louche, suspect, un lieu où on contourne la loi ou la morake. ↑
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Repérées par J.M. Barféty, les affiches au fond du décors sont signées de Zig, l’illustrateur (l’autre face de Zigouigoui le travesti); celle de Maurice Chevalier est datée de 1926. ↑
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https://www.jazzageclub.com/the-costume-designer-zig/5693/ ↑
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Archives de Paris ↑
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op.cit. Page 389 ↑
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Le début de la rue du Prieuré devint la rue Ernest Pécheux après 1925 sur décision du conseil municipal dirigé par le Docteur André Ballu, un autre ami des artistes. ↑
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Promenade du Patis, anciennement quai du château, devenue promenade André BALLU en 1931) ↑
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selon Françis Carco, cité par J.M. Barféty, opus cita ↑
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relevé dans « images cachées » Ed. La Roseraie 1928 ↑
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Edmond Schwartz, arrière-grand-père de l’auteur de l’article. ↑
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Blaise P. ↑
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Archives de la Seine Saint Denis citée par J.M. Barféty. opus cita ↑
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Dans « Aux frontières de l’espoir » ouvrage écrit par Georges Loinger et par Katy Hazan
Éditions Le Manuscrit / Fondation pour la Mémoire de la Shoah – 2006. ↑
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Cahiers du Judaïsme N° 21-22 de juillet 2007 édité par l’Alliance israélite universelle : Page 30 ↑
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https://fr.wikipedia.org/wiki/Maurice_Baquet_(enseignant_ENSEP) ↑
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Dans « Aux frontières de l’espoir » ouvrage écrit par Georges Loinger et par Katy Hazan
Éditions Le Manuscrit / Fondation pour la Mémoire de la Shoah – 2006. ↑
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voir aussi l’article de Katy Hazan publié sur CAIRN https://www.cairn.info/revue-revue-d-histoire-de-la-shoah1-1997-1-page-205.htm ↑
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d’après https://patrimoine.seinesaintdenis.fr/College-Eugene-Carriere par Agnès Paty, Justine Bourgeois, Mouna Deghali ↑
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Archives départementales 93, Gournay sur Marne vue 50/175 Acte de Naissance du 17 janvier 1849 ↑
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site du Musée https://www.eugenecarriere.com ↑
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Au fil du temps des photographies de cette période, (souvenirs de soldats allemands, souvenirs de famille) peuvent ressurgir, ce qui justifie la veille des sites comme ebay.fr ou delcampe.net et leurs équivalents allemands. ↑
Villa MARIE est le nom que des élus ou des fonctionnaires d’après-guerre ont donné à une propriété qui a appartenue à un certain Monsieur Amédée Auguste Marie de 1925 à sa mort en 1939. Cette propriété de Gournay-sur-Marne a une histoire vraiment peu banale dont voici un échantillon.
Elle est entrée dans le patrimoine de la commune en 1951-1952, mais cette propriété existait depuis 1880.
Elle aurait aussi bien pu s’appeler Villa REBOUL, du nom de son créateur architecte et propriétaire qui fut maire de Gournay pendant presque sept ans de 1888 à 1895.
Cette propriété était un des plus grands lots du lotissement dit du « Domaine du Château Blanc[1] ou Prieuré de Gournay-sur-Marne » mis en route par Mr Rustique LOISEL qui déposa le premier cahier des charges de ce lotissement le 14.11.1876 chez Me Coudray, notaire à Chelles.
Un article de la Société Historique[2] raconte la longue histoire de ce lotissement. Le terrain de plus d’un demi-hectare de M. Jules REBOUL allait de la promenade André Ballu (appelé alors « Quai du Château » par le lotisseur ainsi que dans le plan municipal de 1896) et usuellement nommé « Promenade du Patis », jusqu’à l’Avenue Loisel (la rue Ernest Pécheux actuelle).
C’est ce rectangle qu’occupent aujourd’hui trois éléments :
- Le Collège Eugène Carrière.
- Deux immeubles de logements.
- La villa Marie.
Atlas du Patrimoine 93
M Jules REBOUL, (1846-1910) alors âgé de 34 ans, était un architecte parisien, connu des familles NAST et BALLU. C’est probablement en 1880 qu’il s’est lancé dans cette construction.
Jules Reboul vers 1881
Académie d’architecture[3]
Son propre cahier des charges était de s’offrir une grande propriété de villégiature pour sa famille avec des capacités de réception pour les amis, amateurs de tranquillité bucolique, de pêche à la ligne, et même de soirées au coin du feu d’une très grande cheminée, grand luxe de la campagne. L’entrepreneur chargé de sa construction est encore à découvrir. Il avait du mérite car c’était là ce qu’on appelle « une maison d’architecte » : elle comprenait des petits défis techniques, une hauteur sous plafond respectable, de la charpente métallique, des voutes en béton coffré à tous les étages et entresols, une surface sous toiture sans piliers encore impressionnante aujourd’hui.
Son architecture un peu compliquée avec plusieurs pentes de toit et des généreuses avancées normandes a vraisemblablement inspiré les constructions de meulières à toitures à saillies ou débords, plus modestes tout de même, qui ont suivi dans le « Domaine du Château Blanc du Prieuré » jusqu’à la belle époque incluse.
Extrait d’un plan de la voierie du lotissement du Prieuré validé par la municipalité en 1896
Faustin Besson le beau-père de Jules Reboul avait acheté un premier lot le 18 et 22 novembre 1876 de 1078m2 de terrain et constructions cédé par M. et M. Rabuteau, Jean alphonse Rabuteau était le lotisseur de cette partie du prieuré qu’il avait acheté aux enchères publiques après défaillance de Mme Nail-Lafosse. Arps le décès de Faustin Besson en 1882, ce lot revint à sa fille Faustine, épouse de Jules Reboul. Celui-ci avait acheté dans le lotissement Loisel et Cholin un lot de 1262m2 le 24 juin 1877 donnant sur l’avenue Rabuteau (aujourd’hui Eugène Carrière) et sur l’avenue du Potager (aujourd’hui Nast), sans doute dans le but de monter des opérations de construction-vente clé en mains pour des parisiens en quête, comme lui, de villégiature. Il avait veillé à acheter des terrains non inondables autant que possible au-dessus des 39 mètres NGF. Le 16 mai et le 27 juin 1882 Jules Reboul acheta un lot de 3606m2 de terrain au lotisseur Rabuteau et son épouse.
Jules REBOUL a probablement loué une habitation du centre du village pendant les travaux entre 1880 et 1882 à moins qu’il n’ait été hébergé par les NAST ou les BALLU au Château Rouge ou à la Faisanderie.
Afin d’alimenter sa propriété en eau potable et bien qu’il disposa déjà d’un puits maçonné en haut de sa propriété à l’altitude de 40 mètres, qui donnait de l’eau mais qui ne pourrait pas rester longtemps potable avec l’urbanisation du lotissement, il décida de chercher de l’eau plus profonde. Il fit faire en février 1885 par la maison Brochot et Cie à l’emplacement du puit en maçonnerie préexistant, un forage[4] pour alimenter ses bassins et son arrosage, l’eau du puit était à -3,40 m et l’eau de la nappe surgissait à -9,40m de profondeur, le forage fut arrêté dans des marnes blanches à veines jaunes à -13,41m.
Jules REBOUL venait en villégiature aux beaux jours à Gournay avec sa famille, son beau-père Faustin BESSON, deux domestiques et une institutrice. Aubert Clément Jules REBOUL s’était fait un nom comme architecte : Jules REBOUL. Pourtant en mairie, la plaque de marbre honorant les maires de Gournay, inaugurée en 1997, le nomme par erreur Jean REBOUL.
Jules REBOUL était né à Paris en 1846 d’un père vaudois protestant[5], Jacques François REBOUL, négociant et de Adeline PARENT, soeur d’Henri[6] et Clément PARENT, architectes parisiens très prisés de l’aristocratie, bâtisseurs de châteaux et de palais.
Jules REBOUL fit de brillantes études d’architecture à l’École Nationale des Beaux-Arts de Paris et épousa en 1874, Faustine BESSON, fille du grand peintre Faustin BESSON, d’origine franc-comtoise, décorateur des palais du Second Empire (Tuileries, Saint Cloud, etc.) et de nombreux palais et hôtels particuliers jusqu’à son décès.
Nécrologie de Faustin Besson (1821 Dôle -1882 Paris)
En 1872-1873, le jeune architecte Jules REBOUL fut désigné secrétaire du comité chargé du concours pour la maîtrise d’œuvre de la reconstruction de l’Hôtel de Ville de Paris, qui avait été incendié pendant l’insurrection de la Commune. Le concours eut pour gagnant le binôme Théodore BALLU (1817-†1885) et Edouard DEPERTHES (1833-†1898). Le chantier colossal dura jusqu’en 1882, il impliqua de nombreux artisans, et les plus renommés artistes[7], sculpteurs, peintres et décorateurs de l’époque.
L’hôtel de Ville incendié et photographié en 1871
Théodore BALLU (1817-1885)
Architecte de la reconstruction de l’Hôtel de Ville de Paris
REBOUL travailla dans le cabinet d’architecture PARENT, de ses oncles, avant de se faire un nom et d’installer son propre studio d’architecture à 35 ans en 1881, au 19, rue Bonaparte. Il fut membre de la Société Centrale d’Architecture de 1881 à 1897. Plusieurs de ses réalisations sont classées M.H. ou figurent à l’inventaire supplémentaire des Monuments Historique ou encore sont dans les listes des immeubles remarquables et protégés par un PLU, notamment : selon la base Mérimée du Ministère de la Culture
PA00088874 Musée Jacquemart-André commandé en 1868 par M ANDRE à Henri PARENT qui s’associa à son gendre Jules REBOUL, terminé en 1875.
PA00088831 Hôtel Potocki (siège actuel de la CCIP) 27, avenue de Friedland en 1882-1884
IA00034064 Chateau de Bailly à la Chapelle Rainsoin en 1884-1885, reconstruction partielle en style néo-gothique
PA39000043 Établissement thermal de Lons le Saulnier en 1891-1894.
Il est probable que Jules REBOUL ait acquis ses trois lots de terrains à Gournay sur la recommandation de Théodore BALLU (1817-1884) qui venait souvent à Gournay pour se détendre, dessiner et pêcher, profitant du Château Rouge des Nast ou de la Faisanderie, le manoir de villégiature un peu rustique de son fils Roger BALLU, marié à Émilie Gabrielle NAST.
A l’été 1881 dernier recensement avant l’arrivée de la famille de Jules REBOUL, le recensement de la petite commune de Gournay avait déjà eu lieu. Il n’y avait encore que 142 habitants, dont 103 rive gauche et 39 rive droite, qui vivaient dans seulement 34 maisons et dans 45 appartements répartis dans 5 immeubles collectifs. C’est dire si Gournay avait plus du petit village rustique que d’un bourg.
Le beau-père de Jules REBOUL, l’artiste peintre Faustin BESSON, fut, en 1881 jusqu’à son décès en 1882, brièvement conseiller municipal de Gournay dont le maire était le châtelain Louis-Gustave NAST. Comme Roger BALLU, il n’était pas très assidu aux réunions semestrielles du conseil municipal.
Jules REBOUL, qui était déjà un des deux plus gros contribuables fonciers de Gournay avec Louis Gustave NAST, le châtelain, remplaça en 1882 son défunt beau-père Faustin BESSON au conseil municipal présidé par Louis-Gustave NAST.
L’avenue de la Marne du lotissement du Domaine Château-Blanc du Prieuré, fut rebaptisée Faustin BESSON probablement pendant la seconde mandature de Roger BALLU en 1900 après que le préfet de Seine et Oise ait validé la reprise par la commune de la voierie du Domaine du Prieuré-Chateau Blanc
Jules REBOUL fut réélu conseiller municipal de Gournay-sur-Marne aux élections de mai 1886 à la suite desquelles Amédée PONCELET employé de commerce, radical, fut élu maire contre le sortant conservateur Louis-Gustave NAST, battu de peu. Mais en février 1888, à la suite de la démission surprise de M. Amédée PONCELET obtenue par des manœuvres de la droite municipale, c’est Jules REBOUL qui fut élu maire de Gournay-sur-Marne avec des voix de la droite au centre gauche. Protestant, Jules REBOUL avait une image de républicain modéré.
La liste REBOUL fut réélue aux élections suivantes, cette fois elle incluait Roger BALLU et Gustave NAST. Dernier coup de théâtre en avril 1895, Jules REBOUL présenta sa démission par surprise ce qui permit, à son ami Roger BALLU sensiblement plus conservateur, de se faire élire maire, celui-ci démontrait là un bel opportunisme pendant l’absence de Gournay de son beau-père Louis Gustave NAST.
En 1886 Jules REBOUL était recensé[8] à la future villa Marie, appelée alors « Domaine du Patis » avec son épouse Faustine, ses cinq enfants, une femme de chambre, une cuisinière, une institutrice, un couple de jardiniers.
En 1891, REBOUL était recensé à Gournay à 48 ans avec sa femme Faustine de 38 ans, ses quatre filles, un fils et un couple de domestiques suisses de la Chaux de Fonds (canton de Neufchâtel). Qui s’occupait donc du jardin d’un demi hectare ? Sans doute un de ses voisins horticulteurs et conseillers municipaux, M. JOUANNE ou M. BRAILLY, il y avait l’embarras du choix en horticulteurs et jardiniers à l’époque à Gournay où s’organisait même les concours de la profession en alternance avec Le Raincy ou Gagny.
En 1896, Jules et Faustine sont encore recensés avec leurs cinq enfants et deux domestiques. Mais en 1901, les REBOUL avaient mis le cap à l’ouest, avenue de Versailles à Paris.
Jules REBOUL quitta certainement Gournay pour des raisons professionnelles qui le conduisaient de plus en plus souvent en province notamment en Franche-Comté. Il mit en vente sa propriété de 5446 mètres d’abord de gré à gré au prix de 41.000 francs en octobre 1898. L’acquéreur Monsieur Jules Nicolas Moulin et son épouse Marie Louis Soyer payèrent ce prix plus les frais.
Un nouvelle vente par mise aux enchères est organisée par Me Barbe, notaire à Chelles, au prix de départ de 38.000 francs, indiquant dans l’annonce du 18 mai 1901 que la luxueuse propriété avait couté près de 240.000 francs. Il est possible qu’il ait compris dans ce chiffre ses beaux meubles, ses fresques, ses peintures, des sculptures et fabriques du jardin. Les murs et grilles de clôture, les aménagements paysagers représentèrent aussi un budget important.
Ce montant de 240.000 fr devait sembler exorbitant pour Gournay puisqu’une belle maison comme la villa « Les Iris » située promenade des Patis venait d’être réalisée par l’architecte local Fréderic BERTRAND avec seulement 15.000 francs de travaux, décoration, honoraires techniques et terrains en sus.
Occupants et/ou propriétaires ultérieurs du « Domaine du Patis » au 3 rue Ernest Pécheux
La propriété fut acquise par Mlle Eugénie Mare Bossoreille au prix de 45.000 francs.
La rue Ernest Pécheux[9] nom actuel de la voie en L reliant l’avenue Eugène Carrière et la rue Faustin Besson a eu le nom de « rue du Prieuré » après plusieurs années sous l’appellation de « rue Loisel » le nom qui était prévu dans l’ultime cahier des charges du lotissement Loisel-Rabuteau du 16.12.1884
En 1903 et 1904 M et Mme PHYLO demeurant Domaine du Patis passèrent plusieurs annonces dans le mensuel l’Acclimatation des animaux et des plantes pour des animaux. Peut-être étaient-ce des locataires de Mlle de Bossoreille..
En 1905 Mme de BOSSOREILLE passa plusieurs annonces dans le mensuel l’Acclimatation des animaux et des plantes du 17.08.1905.
En 1806 Mme Lucienne de BOSSOREILLE sans doute la mère de la propriétaire veuve était recensée dans cette grande bâtisse avec un jeune garçon et une femme de chambre.
En 1914, la villa apparaissait dans la succession du défunt GRANDIERE Jean Hyppolyte (1836-†1911) célibataire, rentier, sis 12, avenue des Tilleuls à Paris qui était nu-propriétaire. L’usufruitière, Mme CADAU Marie, née en 1840 survivait à son nu-propriétaire.
En 1919, les hommes d’affaire SMILDER Auguste et CARETTE Eugène Paul, sis 71, rue de Maubeuge à Paris, étaient les nus-propriétaires. Les deux hommes qui devaient être en société de personnes, se séparaient judiciairement puisque le 07/07/1921 la nue-propriété du « Domaine de Patis » sise au N°3 Rue du Prieuré était mise en vente sur saisie immobilière, au prix de 20.000 francs, l’annonce précisant à présent que l’usufruitière était née le 4 mai 1840, (et donc était âgée alors de 81 ans). Potentiellement une bonne affaire.
En 1921 c’est M. Jean Marcellin Guillon (1863-†1933) qui acheta aux enchères la nue propriété des 5445,80 m2 de terrains et constructions au prix de 51400 francs plus les frais.
M. Jean Marcellin Guillon fit ensuite l’acquisition de l’usufruit le 7 décembre 1922,.
M. Jean Marcellin GUILLON entrepreneur de travaux publics sis 5, place Clichy à Paris cédait comptant en 1924 au prix de 115.000 francs la pleine propriété du Domaine du Patis à un certain M. Amédée Auguste MARIE, commerçant, célibataire de 43 ans qui à l’époque demeurait 38bis, rue Lamarck Paris 18ème.
Extrait du cadastre en 1950
Qui était ce monsieur MARIE dont le nom est resté à Gournay ?
Ce sympathique MARIE n’était pas une « sainte » à en croire les témoins d’immoralité de Montmartre cités par Jean-Marc BARFETY[10].
Amédée Auguste MARIE, né le 20 février 1881 à Toucy, un bourg à l’ouest d’Auxerre dans l’Yonne, était le fils d’un épicier et négociant en vins. Il avait aidé son père à élargir son activité au négoce de vins. Il s’était engagé devançant l’appel pour choisir son affectation à Paris. L’armée l’avait réformé en 1903 au bout de deux ans de soldat musicien à Paris, pour souffle au cœur.
Ses frères l’ayant précédé à Paris dans l’épicerie, il a pu les seconder un temps. Et là, il emménagea à Pigalle où il s’initia à la vie nocturne. Il reprit enfin comme ses frères, une épicerie, celle-ci dans le nord du 9ème, quartier réputé chaud à l’époque. Il créa un bar-club interdit aux femmes le Ferdinand’s, 89 rue de Cléry dans le 2ème arrondissement. Ce n’était pas sans précédent, mais le commissaire de police soucieux des bonnes mœurs lui avait fait comprendre qu’il ne voulait pas de ça dans son quartier.
Monsieur Amédée MARIE, « tout en rondeurs, exquis à la verve joviale et à l’œil rusé » [11] présentait bien, d’abord connu comme honnête propriétaire bourguignon d’une épicerie et vins fins, rue Fontaine, dans le 9ème arrondissement. Les filles qui garnissaient les meublés du quartier le surnommaient « le sacristain« [12], pour sa chasteté et son allure. Issu du terroir bourguignon, il créa en octobre 1921 un fonds de commerce de restaurant « Au vrai Chablis » sis au 14 rue Laferrière à Paris 9ème.
Fin 1921, Amédée MARIE reprit en plus un fonds de commerce de cabaret à Paris, sis 2, rue Berthe, au cœur de Montmartre.
Poète, le créateur initial du fonds de « La Petite Chaumière » avait tenté, sans réussite, d’en faire un cabaret-spectacle de poésie de haute tenue. La reprise de ce bail en cours était une aubaine à ne pas laisser passer. Il garda l’enseigne « La Petite Chaumière » car le bâtiment dont il n’occupait que le rez-de-chaussée, qui était très proche du funiculaire, sans autre vis à vis, et avait une petite terrasse avec rotonde ou tonnelles qui justifiait un nom bucolique.
La Petite Chaumière est en bas à gauche de cette carte postale de 1905
Amédée MARIE était « Monsieur TAGADA » pour les clients de « la Petite Chaumière » sis 2, rue Berthe à Montmartre. Un lieu vite classé par la préfecture de police dans la sous-catégorie « établissement de nuit à surveiller de très près« . Chronologiquement ce fut le tout premier établissement parisien de cabaret-dancing de travestis, et c’est devenu un des premiers lieux de rencontres inverties[13] des années folles.
Non, ces fraises n’existaient pas encore.
La renommée de « monsieur TAGADA » et de la Petite Chaumière de Montmartre était internationale, c’était devenu en très peu de temps un pôle d’attraction touristique nocturne à Montmartre qui avait le don de bien énerver le Préfet de Police.
Il faut rappeler que l’homosexualité a été légale en France de 1791 jusqu’au régime de Vichy. La ligne rouge était l’âge, la majorité civile étant fixée à 21 ans depuis 1792. Le délit le plus encouru dans ce type de commerce était l’incitation de mineurs à la débauche. Or ses premiers artistes danseurs en 1924 étaient principalement des jeunes, souvent mineurs, prostitués homosexuels et très souvent toxicomanes, venus de la place Blanche qui portait bien son nom.
La gérante[14] de La Petite Chaumière était la jeune compagne de monsieur MARIE, madame Irène LEBRUN qui avait recruté tout au début ses futurs artistes sur le boulevard de Clichy où ils tapinaient.
Mais une fois instruits du règlement intérieur de l’établissement et disciplinés par « Monsieur TAGADA », les jeunes, promus artistes travestis, surent mieux que quiconque, entre deux numéros de danse, bien se tenir avec les clients et surtout faire acheter les bouteilles d’alcool et de champagne parmi les plus chères de Paris. Le bouchon servait déjà d’unité de compte. La clientèle de la Petite Chaumière pouvait être très généreuse avec les artistes et avec la dame qui gérait la logistique des toilettes[15]. Les loges des artistes étaient strictement réservées au personnel.[16]
TAGADA n’était ni souteneur, ni proxénète hôtelier (de toutes façons, ce délit n’existait pas encore).
De nombreux sites communautaires[17] ou touristiques[18] de Montmartre mentionnent « La Petite Chaumière » comme le premier lieu de rencontres homosexuelles masculines de Paris.
Mais la Petite Chaumière de Tagada-Marie n’avait pas de chambre.
À Gournay, ce serait une autre histoire. Autre préfecture, autres mœurs.
National Gallery of Arts : par George Grosz « à La Petite Chaumière » 1924
Crayon, encre noire et aquarelle sur vélin. 47.15 × 62.87 cm
Monsieur MARIE et sa compagne Irène LEBRUN, eurent affaire à la Préfecture de Police et à la justice pour entre autres chefs d’accusation : »Incitation de mineurs à la débauche »[19].
Le préfet de police leur fit involontairement une belle publicité, les ennuis policiers et judiciaires étant rapportés avec des détails croustillants dans les colonnes spécialisées des arts et de la nuit de la presse parisienne, jusqu’au Herald Tribune, le journal américain publié à Paris. Justement cette clientèle internationale, britannique et américaine surtout, était très friande du « Paris interlope[20]« . De riches américaines venaient toutes émoustillées à la Petite Chaumière pour toucher de leurs propres yeux les éphèbes dansants de M. TAGADA entrainés par l’animateur « ZIGOUIGOUI » ou son successeur « TONTON ».
Photo d’origine inconnue postérieure à 1925.[21] achetée sur ebay par la SHNGC
1924, leur troisième année pleine à la « Petite Chaumière » fut une excellente année pour le couple. Les affaires marchaient vraiment très bien, c’était probablement l’endroit où le champagne était vendu le plus cher, à Paris la nuit. La concurrence ne s’est faite sentir que deux ou trois années plus tard avec le mercato des travestis vedettes.
L’amnistie générale de mars 1924 légiférée par le cartel des gauches sauva la mise à Amédée Marie et Irène Lebrun échappant à une condamnation pour incitation à la débauche de mineurs.
Marcel Vertés : le cabaret dancing. Lithographie de 1924 37,8 X 56,2
Sur la lithographie de Marcel Vertés, celui qui se penche vers Zig est peut-être Amédée Marie, le patron dit Tagada avec une tache rose « tagada » au revers de sa veste
Le personnage de droite est Zig dit Zigouigoui, le pilier de la troupe, « meneur de la revue » de 1921 à 1924 (ce qui est un grand mot pour la demi-douzaine de danseurs travestis qui pastichaient des scènes de music-hall). Ces tentures roses pourpres ostentatoires furent signalées par Francis Carco dans « Images cachées ».
À partir de 1925, ayant quitté Tagada, Zig, autrement dit Louis Gaudin (1900-1936) ancien élève de l’École Nationale des Beaux-Arts a fait une fulgurante carrière de décorateur et de costumier[22] dans plusieurs grands music halls parisiens dont les Concerts Mayol d’Oscar Dufrenne, (dont il a aussi dessiné des prospectus), Oscar Dufrenne était un des plus gros clients en plumes et boa de la Maison Schwartz Ullmann dans le monde des spectacles. Zig a fini par diriger des entreprises de spectacles de nuit concurrentes de la Petite Chaumière.
Illustrations d « Images Cachées » de Francis Carco par Marcel Vertés. 1ère édition ed. La Roseraie 1928
Du « Domaine du Patis » au « Castel Mignon »
– 3, rue du Prieuré ou – 5, Promenade du Patis
En 1924, Amédée Auguste MARIE fit donc l’acquisition (en pleine propriété) du « Domaine du Patis » situé 3, rue du Prieuré ( Ernest Pécheux) ou 5, promenade du Patis à Gournay-sur-Marne avant d’épouser à Paris 18ème fin 1924 sous le régime de la séparation de biens, sa jeune compagne et gérante depuis 1922, Mlle Irène (Camille Irène Antoinette) LEBRUN (1900-1986).[23]
Cette fois il se déclara le gérant de la future « hostellerie ».
L’idée de cette grande maison à Gournay selon Jean-Marc BARFÉTY[24] n’était pas d’en faire une résidence secondaire pour eux-mêmes, ni une belle maison pour leurs vieux jours mais d’offrir aujourd’hui un lieu de villégiature pour la « clientèle choisie » qu’ils recevaient habituellement à La Petite Chaumière.
Tagada pensait probablement aux couples qui se seraient trouvé, à la Petite Chaumière, des affinités voire plus, et que le standing du Grand Hôtel Lepic de son frère Georges MARIE, ou des hôtels similaires de Montmartre, ne comblait pas. Il envisageait aussi d’accueillir des couples romantiques comme il en existait de plus en plus dans le monde artistique et littéraire de Montmartre.
Le bien du 3, rue du Prieuré[25] sur un terrain de près de 5500m2, ne comprend alors que la grande bâtisse d’habitation et de réception de villégiature bourgeoise en meulières de Jules REBOUL avec vue sur la Marne, puisqu’elle en est riveraine à hauteur du n°5, Promenade du Patis[26] avec un jardin paysager et arboré, des bassins, un potager et un verger.
En 1924, les seuls voisins à l’ouest étaient la famille de Paul Ernest PÉCHEUX peintre-décorateur à la retraite, veuf, propriétaire de la villa les Pervenches au 1, rue du Prieuré. Il était également le maire de Gournay-sur-Marne, depuis le décès en 1908 de Roger BALLU dont il fut l’adjoint. Il est décédé, le 18.01.1925 à 83 ans. Sa fille unique Jeanne, épouse de Jules LEMOINE, professeur agrégé de mathématique et physique, décédée en 1941 y éleva une grande famille.
En face du 3, rue du Prieuré, habitaient en villégiature M et Mme Edmond SCHWARTZ, propriétaires d’une maison de plumasserie, fournisseurs des grands spectacles, ou d’autres membres des famille SCHWARTZ et ULLMANN, venus surtout pour la pêche aux brochets et aux gardons le jour, aux chevennes la nuit.
De l’autre côté de la rue Faustin Besson, Mme Cécile BOUYSSON née BEL et Marguerite une nièce étaient en villégiature dans le beau manoir de la tante Cécile BEL (veuve d’Archibald BROAD en 1907) qui décédait en 1925 à Paris. Le manoir Bel-Broad fut sans doute mis en vente après 1926 par Cécile BOUYSSON, probablement la seule héritière.
En juillet 1926, après deux années de travaux de transformation, auxquels participèrent des employés de ses établissements parisiens, l’appellation « Domaine du Patis » fut remplacée par l’enseigne « Castel Mignon« . Amédée MARIE ne cachait pas son jeu à Gournay. M. MARIE s’est donc déclaré hôtelier avec une douzaine de chambres luxueuses. Toutefois son hôtel pension qui n’accueillait surtout pas les familles, n’est jamais entré au guide Michelin en treize années d’activité. Contrairement à Montmartre, c’était profil bas et discrétion.
Pour changer des tentures et des rideaux roses pourpres de La Petite Chaumière, les douze grandes chambres avec bains avaient des décorations originales et différentes d’un haut raffinement[27] comme dans les grandes maisons closes de luxe de Paris. Amédée MARIE, esthète, était un habitué des salles de vente et y avait choisi avec goût, au fil du temps, les meubles et les éléments décoratifs du Castel Mignon. Le rez-de-chaussée où l’architecte Jules REBOUL avait créé en 1880 une très grande pièce de réception autour d’une immense cheminée fut doté d’un salon-bar américain réservé à la clientèle de l’hôtel et d’une salle à manger de restaurant, Les caves immenses qu’il fit visiter à Francis CARCO étaient probablement emplies des mêmes vins fins de Bourgogne que son restaurant « Au Vrais Chablis ».
Dans « Images cachées » écrit en 1928, Francis CARCO raconte sa visite à La Petite Chaumière reçu par un TAGADA très accort. Quand le patron l’invita ensuite au Castel-Mignon en décembre 1926 : il put voir la chambre aux papillons, la chambre aux roses trémières, la chambre cubiste, la chambre Empire, la chambre Marie Antoinette, les autres étaient peut-être occupées, il y avait parait-il au total douze chambres décorées somptueusement, chacune possédant sa salle de bains.
Amédée MARIE disait à Francis CARCO[28] s’entendre très bien avec le curé de Gournay qui eut l’occasion de sermonner ces jeunes garçons qui portaient des robes moins sévères que les siennes.
Le lancement commercial de l’Hostellerie Castel Mignon donna lieu à une campagne publicitaire entre le 14 juillet et le 3 Août 1926 par publicités rédactionnelles et par annonces classées dans de nombreux titres de la presse quotidienne dans les rubriques « Villégiatures » et « Pensions de Famille »
Les publicités rédactionnelles différaient peu des petites annonces sinon que le texte était télégraphique dans les annonces classées qui de six lignes au début de la campagne passèrent à deux-trois lignes à la fin de la campagne de lancement en août. Par exemple :
Publicité dans le quotidien LA LIBERTÉ dans ses éditions du 14 et 15 juillet 1926 Page 2/6: Castel Mignon est ouvert 5, allée des Patis,
Gournay-sur Marne. Tél 27. 20 km
Paris par porte Vincennes ou gare Est
Déjeuners, dîners ; 30 fr grands vins,
Grands et petits appartements, tout con-
-fort. Tranquille, reposant, discret.
Clientèle choisie.
Les premières annonces, le 14 et 15 juillet dans le journal « La LIBERTE » donnaient une adresse erronée « 5, allées des Patis », l’erreur fut corrigée dans les suivantes avec « 5, promenade du Patis ».
Mettre ainsi en avant l’adresse de la Promenade du Patis qui n’était pas l’accès normal de la propriété peut surprendre. Tagada pensait-il que ses clients qui ne se sentaient pas en odeur de sainteté auraient du mal à s’encanailler au 3, rue du Prieuré ?
Publicité dans les petites annonces de la rubrique Villégiatures à 5 Fr la ligne
de PARIS-SOIR du 25 du 26 et du 27 juillet 1926 et idem dans L’INTRANSIGEANT
et dans EXCELSIOR les 25 au 31/07/ 1926
CASTEL MIGNON
5, promenade des Patis, Gournay-s.-Marne. Tél. 27
Hostellerie, restaurant, pension famille confortable.,
petits et grand appartements. Prix pour séjour. —
Publicité dans les petites annonces à 5 Fr la ligne de la rubrique Hôtels-Pension de Famille-Villégiature de COMOEDIA du 03/08/1926, un titre qui touchait bien le monde des arts et de la culture :
CASTEL MIGNON,
5, promenade du Patis, Gournay-sur-Marne. Tél. 27.
Hostellerie restaurant. Pension famille confortable.
Petits et grands appartements. Prix pour séjours.
Dans LE JOURNAL du 24/07/1926
CASTEL MIGNON
5, promenade du Patis, Gournay-s.-Marne, T.27.
Hostellerie-rest. Pens. fam. Conf. Pet. et grds
appartements. Prix pour séjours. »
Il ne semble pas qu’il y eut d’autre publicité dans la presse pour le Castel Mignon les années suivantes. Amédée Marie se contentait du « bouche à oreille » dans le milieu artistique et de la promotion directe auprès de la clientèle de La Petite Chaumière. Les artistes danseurs qui aimaient bien cet endroit aussi se faisaient prescripteurs.
Autre preuve que le tourisme à Gournay n’avait pas attendu les congés payés, en 1931, le propriétaire[29] d’en face au 12, rue Ernest Pécheux, passait une annonce dans la rubrique Villégiature de l’Intransigeant :
et le même jour paraissait une annonce pour pension à 35 francs au 4 quai de Marne à Chelles
Le repas seul coûtait déjà 30 francs sans les boissons au Castel Mignon.
Amédée MARIE est décédé prématurément le 29 avril 1939 à Paris XVIème à 58 ans. Le cœur a ses raisons que la raison ne connait point[30]. Il savait sans doute depuis son conseil de réforme militaire qu’il ne fallait pas trop compter dessus. Il fut enterré le 2 mai 1939 au cimetière parisien de Pantin.
Sa veuve refusa l’usufruit auquel elle avait droit. L’actif de la succession MARIE à la date du décès était estimé à 339.000 francs environ et le passif à 64.000 francs environ.
Les ayants droits d’Amédée MARIE, sa fratrie et ses neveux et nièces mirent plus de dix ans à régler des successions croisées. La succession MARIE mit en vente, fin juillet 1939, les meubles du Castel Mignon dont le commissaire-priseur tira en deux vacations presque 33.000 francs, une très belle somme[31].
Le sort de l’hostellerie Castel Mignon pendant la guerre et l’occupation n’a pas marqué les esprits des Gournaysiens. Comme la propriété n’était plus meublée, elle n’a pu être pillée.
Il est possible que les pouvoirs publics d’avant l’armistice du 22 juin 1940 l’aient réquisitionnée pour loger des réfugiés français ou belges, c’est difficile à certifier. S’il existe des preuves d’une réquisition, la Société Historique en trouvera dans les archives municipales ou départementales. Le mandat des conseillers municipaux élus en avril et mai 1935 pour six ans, furent maintenus jusqu’ en novembre 1942. Le gouvernement de Vichy procéda par décret en 1942 pour nommer les membres et président de la Délégation spéciale municipale dans chaque commune. Il n’y a eu pas de conseil municipal pendant cette période.
Il n’est pas impossible que les occupants allemands se soient installés dans la villa Marie ainsi que dans l’ancienne maison de Mlle BEL pour loger des officiers d’autant que leur Kommandantur était située au Rond-Point du Prieuré. Cela reste à certifier par les archives, notamment par les déclarations des dommages de guerre des propriétaires. Des images souvenirs des militaires allemands peuvent se retrouver en vente un jour ou l’autre. Des rumeurs de collaboration horizontale entre juin 1940 et aout 1944 ont circulé et des femmes ont été tondues à Gournay.
Gournay est libéré par les Américains le 27 août 1944 et le Comité local de libération constitué le 28 août 1944 est dirigé par Édouard LE PICHON sans la totalité des attributions communale.
La municipalité sortie des urnes en avril 1945 est 100% issue de l’Union Patriotique Républicaine qui comprenait 7 communistes dont M Félix MERCADIER, PCF, qui fut élu maire. La finalisation de la succession MARIE n’était pas en vue, l’acquisition par la commune n’a pas été envisagée. Il ne fallait pas être grand clerc pour comprendre que la succession MARIE était alors satisfaite de voir l’État pour le compte de la Direction Générale de l’Éducation et de la Jeunesse, réquisitionner la propriété MARIE moyennant une indemnité d’occupation temporaire pour sa mise à la disposition de l’O.S.E.
L’Œuvre de Secours aux Enfants (O.S.E.), était la branche française d’une structure internationale de la communauté juive créée par des médecins hygiénistes qui œuvre depuis des dizaines d’années, en Europe, en France notamment, pour les réfugiés juifs de l’est.
L’Oeuvre de Secours aux Enfants O.S.E.
En 1945, l’O.S.E. se chargeait en priorité des orphelins et des enfants déplacés sans nouvelle de leurs parents déportés. Certains enfants et adolescents souffraient de dénutrition et de troubles squelettiques qui nécessitaient des soins médicaux et de réadaptation comme la kinésithérapie et la gymnastique. En même temps, l’O.S.E. qui poursuivait son apostolat de l’hygiénisme, souhaitait former pour ses propres besoins et mettre à l’épreuve pratique des moniteurs pour maison d’enfants et société sportives avec le soutien de l’administration générale des sports et de la jeunesse.
En juillet 1945 Georges Loinger[32] est le chef de la section Éducation physique au bureau de la Direction Centrale à Paris de l’Œuvre de Secours aux Enfants.
« l’OSE me demande de monter une école de moniteurs sportifs à Gournay-sur-Marne. Aussitôt dit, aussitôt fait avec en plus la bénédiction et l’appui du ministère de la Jeunesse et des Sports très intéressé par le projet. »
Georges Loinger embauche son second Maurice Brauch, un jeune, survivant de Buchenwald.
« Est installé à Gournay un internat pour les apprentis moniteurs, mais également pour quelques enfants ayant besoin de gymnastique corrective et donc de soins suivis ».
– United States Holocaust Memorial Museum. photo © Walter Limot
Des travaux d’adaptation des locaux furent réalisés. Le centre O.S.E. de Gournay devait comprendre :
1° l’hébergement sous le statut d’une auberge de jeunesse : disposant d’un dortoir garçons et d’un dortoirs filles, d’une cantine.
2° l’instruction et la formation avec du personnel spécialisé dans des salles de classes,
3° les activités physiques d’entrainement : Salles de kiné et de culture physique…Terrains de sport (volley, basket, agrès, etc.)
Droit et Liberté 29 novembre 1945
« En octobre 1945, G. Loinger ouvre l’école de Gournay-sur-Marne, où une vingtaine de jeunes reçoivent leur première formation de moniteurs . »[33]
Les cours principaux pour élèves moniteurs devaient y être assurés par M. Maurice Baquet[34] Directeur Technique du Collège National de Joinville. Mais il fut nommé fin 1945 Directeur-adjoint de l’INS (futur INSEP de Joinville le Pont) et n’eut probablement pas le temps de faire tout ce qui était prévu pour l’O.S.E. de Gournay.
« Malheureusement, l’aventure ne dure qu’un an, faute de financement, et, furieux, je donnai ma démission à M. Ratner de l’OSE. »[35] (G. Loinger)[36]
© Walter Limot https://collections.ushmm.org/search/catalog/pa1158206
Remise de diplômes en 1946 photo de © Walter Limot
Municipalisation de la propriété Marie
GOURNAY-SUR-MARNE ; COLLÈGE EUGÈNE-CARRIÈRE – VUE DES ALENTOURS Mouna Deghali © CAUE 93
Enfin en décembre 1950 le notaire de la succession MARIE avait réglé les derniers détails, déposé la déclaration de succession définitive et remis le titre de propriété aux consorts MARIE. Le notaire avait fixé la valeur vénale des 5500 m2 à 1.800.000 fr en 1945. Il fallait encore qu’ils se mettent d’accord sur un prix de cession. Les vendeurs étaient maintenant pressés de vendre pour tirer parti de la pénurie.
Les archives municipales indiquent que les services de l’Administration des Domaines avaient fixé le prix à 2.200.000 fr repris dans l’acte authentique de vente à la commune de Gournay représentée son Maire monsieur Adolphe PERILLAT-PIRATOINE. La commune avait sollicité un financement auprès de la sécurité sociale car la destination première de cet immeuble étant des services sociaux, notamment un centre P.M.I. Protection Maternelle et Infantile.
M Adolphe PERILLAT-PIRATOINE, maire pendant trois mandats entre 1947 et 1961, a pu ensuite y installer des petites classes de primaire jusqu’au certificat d’études primaires et des logements pour les enseignants.
Pendant les deux mandats de 1961 à 1983, de Robert RINGO, qui prévoyait une forte croissance démographique, il a fallu persuader l’état qui voulait regrouper Gournay avec Noisy Le Grand, que Gournay avait impérativement besoin d’avoir son propre C.E.S. Collège d’Enseignement Secondaire, ce qu’il a obtenu. Ensuite il y eut d’âpres discussions sur le format de l’établissement. C’est donc au même endroit que le Groupe Scolaire de la rue Ernest PECHEUX a été construit en 1969 et livré en 1971. C’était un ensemble de six constructions neuves autour d’une cour de récréation, conçu pour accueillir 12 classes, (dont deux classes de perfectionnement dans un préfabriqué) et deux bâtiments de logements de fonction type F3 et F4, l’un étant situé vers la promenade André-Ballu et le second étant situé du côté de la rue Ernest-Pêcheux en mitoyenneté avec la villa Marie.
En raison des risques d’inondation, les bâtiments les plus au nord ont été élevés sur un vide sanitaire à 1,50 m environ du sol naturel.
La villa Marie a accueilli le réfectoire du groupe scolaire et encore des logements de fonctionnaires. Cet établissement scolaire du 1er degré put même accueillir quelques classes d’enseignement secondaire avant de devenir un collège[37] après la construction d’une nouvelle école rue des Pâquerettes.
Toutefois, l’augmentation des effectifs et des problèmes de dysfonctionnement conduisirent le Département, le 27 juin 1989, sur l’instance de la municipalité de Georges ROBERT (de 1983 à 1995) à programmer une rénovation complète de l’établissement définie en 1990 et à décider fin 1990 une extension « format 450 » pour livraison en 1993. Cette fois l’établissement reçu officiellement un nom : « Collège Eugène Carrière ».
Parmi les constructions d’origine de 1971, le bâtiment principal a été conservé, ainsi que les logements de fonction. Construit selon la technique du pont en poutre treillis, le bâtiment suspendu qui relie un bâtiment de 197, relifté et un nouveau bâtiment donne une « impression de transparence et d’ouverture sur le paysage environnant » selon le verbiage de l’Atlas du Patrimoine de Seine Saint-Denis.
À propos d’Eugène Anatole Carrière :
L’artiste peintre, est né à Gournay le 16 janvier 1849 à 3 h du matin [38] et il fut baptisé avec un de ses frères la même année à Gournay-sur-Marne. Il n’y serait resté que trois ans environ. Mais ses parents et sa fratrie y vécurent d’avantage puisque son père Léon Carrière, 32 ans sous-directeur d’assurance y a été recensé avec sa femme, sa belle soeur et ses 5 enfants, en mai 1846, deux ans et demi avant la naissance d’Eugène, à l’adresse Grande Rue, 9 ce qui correspond à un immeuble d’appartements côté est de la place de l’église, entre l’ancienne mairie et le café-pension-tabac de Mme Dardou Vve Monnet.
Eugène Carrière à la Villa des Arts
Destination actuelle de l’immeuble :
Le bas de la villa Marie est devenu le Musée Eugène Carrière[39] et au-dessus du musée, les logements après réaménagement sont devenus des locaux tertiaires pour les associations :
- la Société des Amis d’Eugène Carrière qui administre le Musée
- la Société Historique de Noisy-Gournay-Champs et son Centre de Documentation Jacques Guillard et le fonds d’archives du Comité Départemental Charles de Gaulle.
Quant au sous-sol, il sert de réserve pour ces associations.
Comparaison des vues aériennes
avec « remonter le temps » [40]de l’institut géographique national
1950
2022
En résumé, ce lieu aura été successivement occupé par :
- Du XIème au XVIème siècle inclus, le logis d’un prieuré d’une trentaine de très chastes et très laborieux moines bénédictins, filiale de Notre Dame des Champs de Paris.
- Sous le roi Soleil, la résidence d’intellectuels de haut niveau ayant fait voeux de célibat, l’abbé de Dangeau et l’abbé Alary, anciens précepteurs royaux et membres de l’Académie Français.
- Au début du XIXème la villégiature de trois générations de Nast, industriels céramistes, philanthropes, châtelains, et maires de Gournay.
- Entre 1870 et 1873, le campement de soldats wurtembergeois.
- Durant le dernier quart du XIXème la maison de campagne de l’architecte Jules Reboul, maire de Gournay pendant le premier lotissement de Gournay, et de son beau père l’artiste peintre classique Faustin Besson.
- Pendant la première guerre mondiale, à rechercher éventuellement aux archives des trois sociétés de la Croix Rouge.
- Entre les deux guerres, une mignonne hostellerie de tolérance pour clientèle choisie.
- De juin 40 à août 44, une pension militaire avec éventuellement une collaboration horizontale. (probable, restant à certifier[41]) .
- Après-guerre un centre de formation de l’Œuvre de Secours aux Enfants (juifs).Dans les années 50-60 un centre de santé infantile et plusieurs classes primaires.
- Dans les années 70, le réfectoire d’un collège du secondaire.
- Dans les années 80-90-00 des logements majoritairement d’enseignants.
- Depuis les années 2010 : Au 3, rue Ernest Pécheux aux étages : les locaux et siège de la SHNGC, une société savante se consacrant à l’histoire de proximité. Au 5, avenue Ernest Pécheux au R-D-C et aux étages : le siège de l’association des amis d’Eugène Carrière www.eugenecarriere.com et du Musée Eugène Carrière
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Étude de la société historique réalisée entre août 2023 et mars 2024 par Claude Antoine Schwartz avec l’assistance d’Alain Barthelmay et l’aimable concours de Mme Sylvie Le Gratiet. Article publiée initialement en mars 2024 (versionV5) sur gournay-historique.fr
L’article sera mis à jour au fur et à mesure des découvertes probables ou certifiées.
La société historique remercie les visiteurs du site qui voudront bien y laisser des commentaires et / ou y déposer des informations, images, coupures de presse, etc.
V5
Vous aussi, vous pouvez contribuer à écrire l’histoire de votre ville. Lancez-vous, les membres de la Société Historique Noisy Gournay Champs ne demandent pas mieux et vous aideront.
Pour nous contacter : contact-shngc@gmail.com
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Le confortable logis du Prieur du Prieuré de Gournay avait pris le nom de « Chateau Blanc » après son acquisition et sa transformation en villégiature par Jean Népomucène Nast, riche industriel parisien en 1803 ↑
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Par Alain Barthelmay et Claude Schwartz https://www.gournay-historique.fr/2024/01/03/les-protagonistes-du-lotissement/ ↑
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source http://conservation.academie-architecture.fr/objet/537 ↑
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BRGM Infoterre Fiche Données – Dossier du sous-sol – BSS000PMHT http://ficheinfoterre.brgm.fr/InfoterreFiche/ficheBss.action?id=01845X0034/F1 ↑
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Vaudois, habitant du canton de Vaud, en Romandie au nord du Léman, un état francophone de la confédération helvétique. Biographie tirée de https://www.societe-emulation-jura.fr/wp-content/uploads/2021/10/architectes-Jura-XIXe-2021.10.07.pdf ↑
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Henri Parent est intervenu comme architecte dans la rénovation et l’extension du château de Noisiel. ↑
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Eugène Carrière a peint six écoinçons pour le salon des Sciences, salon d’apparat de l’hôtel de ville de Paris ↑
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Recensement tous les cinq ans de Gournay aux Archives Départementales. ↑
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https://www.gournay-historique.fr/2024/01/28/histoires-des-rues-de-gournay-sur-marne/ ↑
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Nous recommandons le livre de J. Marc Barféty, rééditant et enrichissant de notes, iconographie et compléments « Adonis-Bar » de Maurice Duplay édition Gay Kitch Camp 2023 dont plus de 200 pages sont consacrées à la Petite Chaumière, à Amédée Marie et à ses entreprises. ↑
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Selon Françis Carco dans « Images cachées » édition Albin Michel cité par J.M. Barféty op. cit. ↑
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D’après Pierre de Trévières « Le petit épicier » article paru dans le Cri de Paris 23-11-1924 cité par J.M. Barféty, op.cit. ↑
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1924 fut l’année de la première parution de la revue Inversions (seconde revue ouvertement homosexuelle) voir https://www.memoire-sexualites.org/annees-20/ ↑
Une loi encadrant la prostitution, prévoyait qu’un établissement abritant ce type d’activité ne puisse être dirigée par un homme. Bien que la Petite Chaumière ne répondait pas à cette définition, MARIE fut prudent. ↑
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Nous parlons, bien-sûr, des toilettes des danseurs travestis qu’il fallait changer à chaque numéro. ↑
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Selon les nombreux auteurs cités par Jean-Marc Barfety dans les annexes et les nombreuses notes de l’édition de « Adonis-Bar » de Maurice Duplay édition Gay Kitch Camp 2023 ↑
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Entre autres : http://www.hexagonegay.com/region/paris20.html http://culture-et-debats.over-blog.com/article-341637.html ↑
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https://www.montmartre-secret.com/ ↑
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Archives départementale de l’Yonne : La fiche matricule militaire comporte la mention sévère d’une ordonnance de la cour d’appel de 1924. ↑
Interlope : syn : douteux, louche, suspect, un lieu où on contourne la loi ou la morale. ↑
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Repérées par J.M. Barféty, les affiches au fond du décors sont signées de Zig, l’illustrateur (l’autre face de Zigouigoui le travesti); celle de Maurice Chevalier est datée de 1926. ↑
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https://www.jazzageclub.com/the-costume-designer-zig/5693/ ↑
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Archives de Paris ↑
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op.cit. Page 389 ↑
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Le début de la rue du Prieuré devint la rue Ernest Pécheux après 1925 sur décision du conseil municipal dirigé par le Docteur André Ballu, un autre ami des artistes. ↑
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Promenade du Patis, anciennement quai du château, devenue promenade André BALLU en 1931) ↑
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selon Françis Carco, cité par J.M. Barféty, opus cita ↑
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relevé dans « images cachées » Ed. La Roseraie 1928 ↑
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Edmond Schwartz, arrière-grand-père de l’auteur de l’article. ↑
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Blaise P. ↑
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Archives de la Seine Saint Denis citée par J.M. Barféty. opus cita ↑
Dans « Aux frontières de l’espoir » ouvrage écrit par Georges Loinger et par Katy Hazan
Éditions Le Manuscrit / Fondation pour la Mémoire de la Shoah – 2006. ↑-
Cahiers du Judaïsme N° 21-22 de juillet 2007 édité par l’Alliance israélite universelle : Page 30 ↑
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https://fr.wikipedia.org/wiki/Maurice_Baquet_(enseignant_ENSEP) ↑
Dans « Aux frontières de l’espoir » ouvrage écrit par Georges Loinger et par Katy Hazan
Éditions Le Manuscrit / Fondation pour la Mémoire de la Shoah – 2006. ↑-
voir aussi l’article de Katy Hazan publié sur CAIRN https://www.cairn.info/revue-revue-d-histoire-de-la-shoah1-1997-1-page-205.htm ↑
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d’après https://patrimoine.seinesaintdenis.fr/College-Eugene-Carriere par Agnès Paty, Justine Bourgeois, Mouna Deghali ↑
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Archives départementales 93, Gournay sur Marne vue 50/175 Acte de Naissance du 17 janvier 1849 ↑
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site du Musée https://www.eugenecarriere.com ↑
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Au fil du temps des photographies de cette période, (souvenirs de soldats allemands, souvenirs de famille) peuvent ressurgir, ce qui justifie la veille des sites comme ebay.fr ou delcampe.net et leurs équivalents allemands. ↑