Un peu d’histoire de Gournay par Jacques Guillard (1942-2004)
Un peu d’histoire de Gournay sur Marne par Jacques Guillard (1942-2004)
Vingt ans après la disparition de Jacques Guillard qui fut la cheville ouvrière de la société historique de Gournay-Champs-Noisy (comme elle s’appelait à sa création) nous rendons un hommage à celui qui inspire encore les historiens de bonne volonté de Gournay-sur-Marne en re publiant une histoire de Gournay qu’il savait si bien résumer.
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L’origine de Gournay est très ancienne.
Des fouilles archéologiques récentes ont permis d’y retrouver un village d’artisans du 1er siècle avant J.C. et ont constaté une occupation continue à l’époque mérovingienne et carolingienne.
Haimon ou Hémon ou Aymon Ier de Corbeil, descendant des Comtes de Paris, épouse en 946 ou 947 Élisabeth le Riche, Dame de Sceaux-en-Gâtinais et de Larchant.
Élisabeth le Riche est la fille de Lisiard de Corbeil.
À l’occasion de son mariage, Aymon Ier de Corbeil est investi du comté de Corbeil et de la seigneurie de Gournay-sur-Marne par Hugues Le Grand (897-956), Duc des Francs. Hugues le Grand est le père de Hugues Capet, fondateur de la dynastie capétienne.
L’importance du personnage fait supposer que Gournay était déjà un lieu important, probablement un castrum (petit fortin en bois, sur motte, entouré de palissades), un de ceux que Charles II le Chauve avait fait bâtir sur la Marne, la Seine et l’Oise pour se défendre des Normands.
Vers 1063, Guy II de Montlhéry dit le Rouge (1055-juillet 1108) devient seigneur de Gournay.Il y fonde un prieuré qu’il donne vers 1079 au monastère Saint-Martin-des-Champs de Paris.
À ce don, il ajoute la chapelle du château, qui deviendra par la suite l’église paroissiale Saint-Arnoult, et le moulin.
Un village, un prieuré, un château dont le seigneur est sénéchal de France, de nombreux marchands passant le gué ou naviguant sur la Marne, tout cela évoque beaucoup d’animation et un village adapté à ces activités.
Mais en 1114, Hugues de Crécy, fils de Guy II le Rouge, est accusé de piller les marchands et de mettre son butin dans le château.
Le roi Louis VI le Gros vient en faire le siège, et après de durs combats s’en empare.
Il le confisque et le donne à Anseau Ier de Garlande (1069 ou 1070-1117 ou 1118), gendre de Guy II de Montlhéry, avec le titre de sénéchal.
En 1330 c’est la reine Jeanne d’Évreux (1310-1371), veuve de Charles IV le Bel en 1328 qui achète la seigneurie.
Leur fille Blanche de France (1328-1393) la donne en 1376 au roi Charles V le Sage.
Gournay devient alors bien de la couronne et sera confiée à des proches du roi.
Pendant la guerre de 100 ans le château fort fut pris par les Anglais. Comme Jeanne d’Arc arrivait de Lagny pour le délivrer, les Anglais s’enfuirent. La Pucelle fit demi-tour avant d’arriver à Gournay.
Pendant les guerres de religion, le roi Henry IV y fit construire un fort, surnommé « Pille badaud », pour empêcher le passage du ravitaillement vers Paris assiégé.
Il dut y avoir de durs combats à Gournay, car un historien de l’époque raconte que l’on y avait du sang jusqu’à mi-chausses.
Citons au XVIIème siècle, le seigneur Étienne Levassor, dont la pierre tombale est dans l’église de Gournay. C’est sa fille mariée avec Louis Ancelin, fils de Perrette Ancelin née Dufour, à la nourrice de Louis XIV, qui fit construire vers 1680 le château de Gournay (notre mairie).
Gournay avait déjà perdu à cette époque beaucoup d’importance et n’était plus qu’un petit village, vivant autour de son château et de sa ferme.
En 1720 c’est le Sieur Paul Poisson de Bourvallais, gros financier qui venait de faire bâtir le Château de Champs, qui acheta la seigneurie de Gournay à la Dame Ancelin. Condamné pour fraude, il est embastillé et ses biens sont confisqués en 1716.
La seigneurie va à Marie Anne de Bourbon, princesse de Conti, fille naturelle de Louis XIV et de Louise de La Vallière. Elle revend aussitôt le château de Gournay à Claude Elisée de Court de La Bruyère, qui l’entoure d’un joli parc plein de fantaisies. La pierre tombale du vice amiral de Court est dans une des chapelles de l’église de Gournay.
À la révolution c’est Anne-Henriette-Françoise Michel, Marquise de Marbeuf, Dame de Champs, qui est propriétaire du château et de la ferme de Gournay. Pendant la Terreur elle est jugée pour opposition à la révolution, et guillotinée. Le château, la ferme, l’église et le prieuré qui prend le nom de Château Blanc sont vendus comme biens nationaux.
Pendant la guerre de 1870 la population de Gournay est évacuée à Torcy. Les bâtiments sont très abîmés par les tirs d’artillerie français et le saccage des troupes allemandes qui occupent Gournay jusqu’en 1873.
À la fin du XIXème, petit à petit des bonnes odeurs de cuisine, des airs de musique et des cris de gaieté s’élèvent des bords de la rivière, ce sont les guinguettes et les canotiers qui arrivent.
D’abord plutôt sélectes sur la rive droite, puis populaires sur l’autre rive à partir de 1930 avec la création du lotissement et de la plage.
On comptera 65 auberges-guinguettes sur 6 kilomètres de rivière, les premièresdatées de 1780.
Puis, vers 1970, le silence revient sur les bords de la rivière désertés à cause de la pollution.
Aujourd’hui, Gournay avec plus de 6 000 habitants est toujours un petit village résidentiel très agréable.
Ses bords de Marne revivent, et les berges ont retrouvé leurs promeneurs, leurs restaurants et même des guinguettes.
Jacques Guillard
vers 2001
Jacques Lucien Guillard qui nous a quitté le 30 avril 2004, gournaysien, fut Président de la Société Historique de Gournay-Champs-Noisy puis président d’honneur de la Société historique de Noisy-Gournay-Champs.